Rencontre avec William Boyd

APPELEZ-MOI JAMES, JAMES BOYD

Depuis ses débuts, il y a une trentaine d’années, William Boyd nous promène dans le monde, dans le temps et dans les vies de ses héros. Et il reprend le flambeau de Ian Fleming pour écrire de nouvelles aventures de James Bond. On a hâte de voir à quelle sauce il va mitonner ce cher 007!

Est-ce après avoir lu votre nouveau roman que la fondation Fleming vous a demandé reprendre le flambeau de James Bond ?
Ils ont effectivement lu « L’attente de l’aube », mais également mon roman précédent, « Orages ordinaires ». Cependant, je pense que c’est plutôt ma manière de travailler dans son ensemble qu’un livre en particulier qui les a convaincus de me confier l’écriture du prochain James Bond.

N’est-ce pas difficile, voire un peu bizarre, de reprendre un personnage que l’on n’a pas créé ?
Je trouve au contraire qu’il s’agit là d’une opportunité extraordinaire. Bond est une icône, un mythe. On m’a donné presque carte blanche et cela ressemble à un magnifique cadeau. C’est comme si l’on vous demandait d’écrire un nouveau Maigret, ou un nouveau Tintin. Votre imagination peut se glisser dans ces figures familières et les embarquer dans un voyage de votre propre invention.

De plus, l’espionnage vous fascine depuis longtemps et avec « L’attente de l’aube » ce n’est pas la première fois que vous lui tournez autour.
De nombreux romanciers, très sérieux, ont été influencés par ce genre littéraire. Je pense à Joseph Conrad, Graham Greene, Anthony Burgess, Muriel Spark, Ian McEwan notamment. Je me vois exactement dans cette tradition. Le principal attrait du roman d’espionnage est qu’il joue avec les grandes questions de notre vie : le mensonge, la duplicité, la trahison, la mauvaise foi, l’identité, la confiance. N’est-ce pas une merveilleuse métaphore de la condition humaine ?

La première guerre mondiale est aussi très présente dans vos livres. Pourquoi cette guerre plutôt qu’une autre ?
Pour de nombreuses raisons. D’abord, c’est une partie de mon histoire familiale. Mon grand-père fut blessé lors de la troisième bataille d’Ypres en 1917. Mon grand-oncle fut décoré à la bataille de la Somme, en 1916. Ensuite, en Grande-Bretagne, la poésie de la première guerre mondiale est enseignée très tôt à l’école. C’est une poésie très puissante, émouvante, qui laisse une forte impression dans nos esprits. Troisièmement, je pense que la souffrance et le carnage de la guerre de 14-18 sont presque impossibles à comprendre.  Il y a quelque chose sur ces quatre années de conflit dans les tranchées qui nous hante. Nous revisitons sans cesse cette période pour tenter de mieux l’appréhender. Enfin, et c’est une obsession très anglaise, la guerre vit en nous d’une manière qui n’existe pas dans les autres pays européens.

Quel a été le point de départ de votre nouveau roman ? Le cadre historique, la psychanalyse, l’histoire d’amour ?
Cela a commencé avec une fascination pour la Vienne du début du 20ème siècle, certainement la ville la plus intéressante de la planète à cette époque. Et puis j’ai visité le musée Freud à Vienne. C’était tôt le matin, seul, et la pensée me vint que cela avait été une chose très audacieuse que d’être psychanalysé il y a une centaine d’années. J’imaginais un jeune homme venant voir son psychiatre en 1913, et j’ai su que j’avais le début d’un roman.

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Je suis sur le point de commencer mon « James Bond », mais en même temps, j’ai entamé des recherches pour mon propre prochain roman, qui sera publié probablement en 2015.

« L’attente de l’aube » de William Boyd, traduit de l’anglais par Christiane Besse (Seuil, 412 p.)

 
 
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