No Home
Yaa Gyasi

Calmann-Lévy
janvier 2017
450 p.  21,90 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Au XVIIIème siècle, au Ghana, alors que la traite des esclaves bat son plein, une petite fille Effia naît alors qu’un incendie fait rage autour de son village. La fillette ignore que sa mère biologique a fui pendant cet incendie et s’est réfugiée dans un village voisin où elle a donné naissance quelques années plus tard à sa demi-soeur, Esi.

Les deux soeurs ne se rencontreront jamais. Elles appartiennent à des ethnies différentes et rivales : Fanti pour Effia et Ashantie pour Esi.

Effia grandit dans le village où se trouve le fort de Cape Coast. Là, sont enfermés et parqués les esclaves avant d’embarquer pour l’Amérique. Tout le village est impliqué dans ce « commerce » et travaille avec les Anglais, les guerriers vont faire des razzias dans les villages voisins, notamment chez les Ashantie.

C’est ainsi qu’Esi sera emprisonnée dans les caves du fort pendant qu’Effia, mariée de force au commandant anglais du fort vit dans les étages supérieurs. Nous suivrons sur trois siècles la destinée des familles de ces deux femmes. : d’une part du côté africain avec les descendants d’Effia impliqués dans la traite ; d’autre part du côté afro-américain avec les descendants d’Esi qui portent en eux la douleur de l’enlèvement, de l’exil de leurs ancêtres ainsi que la difficulté de vivre, voire de survivre, dans une Amérique qui les a toujours maltraités.

Ce roman est non seulement formidable pour l’histoire familiale qu’il nous raconte mais également extrêmement courageux car il n’occulte pas les faits de l’Histoire en mettant en lumière les collaborations des Africains eux-mêmes avec les Occidentaux dans la traite des esclaves :

« Les Grands Hommes, les guerriers, les chefs et leurs semblables amenaient tous les jours des esclaves par dizaines. Le commerce s’était tellement développé, et les méthodes pour rafler les esclaves étaient devenues à ce point hasardeuses que de nombreuses tribus avaient pris l’habitude de marquer les visages de leurs enfants afin qu’on puisse les reconnaître. (…) La plupart des esclaves amenés avaient été capturés au cours de guerres tribales, quelques-uns étaient vendus par les familles. »

Yaa Gyasi dénonce de façon tout aussi explicite le comportement des gouvernements successifs des USA :

» Comment parler de l’histoire de son arrière grand-père sans parler aussi de celle de grand’ma Willie et des millions d’autres Noirs qui avaient émigré au Nord, fuyant les lois Jim Crow ? Et s’il mentionnait la Grande Migration, il lui faudrait parler de ces villes qui absorbèrent ce flot d’hommes et de femmes. Il lui faudrait parler de Harlem. (…) Et s’il parlait du crack, il lui faudrait inévitablement parler de la « guerre contre la drogue ». Et s’il traitait de la guerre contre la drogue, il raconterait comment presque la moitié des Noirs, avec lesquels il avait grandi étaient en train soit de rejoindre, soit de quitter le système carcéral le plus redoutable du monde (…) et comment les amis de son ghetto faisaient cinq ans de prison pour avoir détenu de la marijuana alors que presque tous les Blancs qu’il côtoyait à l’université en fumaient ouvertement tous les jours. »

partagez cette critique
partage par email
 

C’est un premier roman qui nous fait remonter le temps. Deux siècles et demi d’histoire à travers deux branches d’une famille.

Effia et Esi ont les mêmes ancêtres. Ce sont deux familles noires sur la Côte de l’Or, l’actuel Ghana.

Effia sera mariée à un anglais et ira vivre au fort de Cape Coast occupé par les anglais. C’est au décès de son père qu’elle apprendra que sa mère n’est pas celle qu’elle croit et l’existence de sa soeur.

Esi est enfermée dans le cachot des femmes du fort depuis deux semaines, elle sera vendue comme esclave.

Nous allons suivre en parallèle le destin des descendants de chaque branche retraçant l’histoire de l’esclavage, l’abolition de celui-ci, les tensions et discordes entre les « ashantis’ et les « fantis », l’exode vers la liberté mais lorsque l’on est noir de peau est-on vraiment libre un jour ??

Un très beau premier roman de Yaa Gyasi salué par la critique américaine, une jolie fresque du combat quotidien mené par ce peuple en recherche de liberté.

Ma note : j’ai beaucoup apprécié mais il m’a manqué un petit « je ne sais quoi » pour être un coup de coeur. 9/10

Les jolies phrases

Et dans mon village, il y a un dicton sur les soeurs séparées. Elles sont comme une femme et son reflet, condamnées à rester sur les rives opposées de l’étang.

Les Ashantis avaient le pouvoir de capturer des esclaves. Les Fantis avaient la garantie d’en faire le commerce.

Au moins, quand il était esclave, son maître avait besoin de le maintenir en vie s’il voulait en avoir pour son argent; aujourd’hui, si H mourait, ils se borneraient à louer un autre homme. Une mule valait plus que lui.

Tu veux savoir ce qu’est la faiblesse ? C’est de traiter quelqu’un comme s’il t’appartenait. La force est de savoir qu’il n’appartient qu’à lui même.

Si au moment de faire quelque chose, tout te paraît clair, si tu es certaine, alors pourquoi regretter plus tard ?

Retrouvez Nathalie sur son blog

partagez cette critique
partage par email
 

« Répétez longtemps un mensonge et il deviendra vérité. »

Ca commence au XVIII° siècle au Ghana par la naissance de deux soeurs. Même mère, pères différents, villages rivaux. Ca se poursuit par la descendance de chacune, génération après génération, jusqu’à nos jours. Une branche reste sur place, l’autre s’implante aux Etats-Unis. Une branche subit de plein fouet l’esclavage, l’autre s’en émancipe – par les moyens dont elle dispose (y compris en y participant – côté esclavagistes). Toutes et tous luttent, leurs vies durant. Un jour, elles se rejoignent… Un premier roman étonnant de maîtrise et très rythmé de par son procédé narratif. On s’attache très vite aux personnages successifs – certaines scènes sont très, très dures – et à un moment on se fait totalement happer, impossible de lâcher le roman, on est très loin et intimement en empathie. Brassant aussi bien les thèmes que les époques (plusieurs siècles et esclavagisme, ségrégation, mines de charbon, champs de coton, métissage, moeurs et coutumes africains…), Yaa Gyasi fait couler une solide documentation à travers une saga familiale impeccable. A lire !

partagez cette critique
partage par email