La malédiction d'être une fille
Dominique Sigaud

Albin Michel
septembre 2019
240 p.  19 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

« C’est une fille »

A votre avis, quels sont les trois mots les plus meurtriers du monde ?
Vous ne trouverez pas, mais prenez le temps de réfléchir. Ça en vaut la peine. Alors, à votre avis ? Hé ! bien les voici : « C’EST UNE FILLE. »
Difficile à croire, et pourtant.
Il faut lire l’enquête de Dominique Sigaud. Dans beaucoup de pays du monde, naître fille est une malédiction. On le sait plus ou moins, mais on ne mesure pas à quel point c’est grave.
Le nombre de femmes qui avortent parce qu’elles attendent une fille et le nombre de petites filles tuées à la naissance, souvent par des mères subissant une contrainte de leur propre famille, est terrifiant.
Et puis il y toutes les violences faites aux filles et la liste est longue : toutes les mutilations sexuelles (infibulation, excision), les viols, les incestes, les mariages forcés, la traite des enfants qui se transforme presque toujours en esclavage et/ou en prostitution. Et évidemment l’impossibilité pour ces victimes d’un recours quelconque. Non seulement elles n’en n’ont pas les moyens mais surtout, si elles protestaient, elles se retrouveraient systématiquement en position d’accusées ce qui aggraverait encore leur condition, voire mettrait en péril leur vie.
Évidemment, ces situations dramatiques se retrouvent essentiellement dans les pays les plus pauvres d’Asie et d’Afrique mais nous aurions tort de croire que les pays occidentaux et développés sont à l’abri. Aux États Unis, 27 états n’ont pas fixé d’âge minimal au mariage. Une étude de 2011 montre que 8,9% des femmes mariées avaient moins de 16 ans ce qui représente 9,4 millions de femmes ! En France, 40% des viols seraient pratiqués sur des mineures de moins de 15 ans, de nombreuses filles subissent des mutilations sexuelles et la prostitution des mineures — dans tous les milieux — ne cesse de croître.
Plus insupportable encore que toutes ces violences, c’est l’espèce d’indifférence qui entoure ce qui est souvent perçu comme une sorte de fatalité voire comme des traditions ancestrales à respecter.
Le constat de Dominique Sigaud est terrifiant : les filles meurent par millions et « on en parle beaucoup moins que de la disparition des icebergs et des oiseaux en ville.»
Cela va-t-il continuer encore longtemps ?

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