Amours
Léonor de Récondo

Points
litterature
janvier 2015
210 p.  6,90 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Une belle récréation

Léonor de Recondo, portée par une écriture d’une justesse rare, nous entraîne dans une histoire d’une autre époque qui, le temps de quelques heures, nous offre une belle récréation. Anselme de Boisvaillant, notaire installé dans le Cher, est marié à Victoire depuis cinq ans. Cette dernière ne lui a toujours pas donné de descendance. Et n’apprécie guère le devoir conjugal pour lequel elle montre peu d’empressement. Anselme, en bon bourgeois sûr de ses propriétés, honore donc de ses faveurs la toute jeune Céleste, bonne de la maisonnée. Sans qu’elle y consente. Mais, en 1908, la domesticité n’a guère la parole et le droit de cuissage a cours sans que quiconque y trouve à redire. Huguette et Pierre, un couple de domestiques plus âgés, ne sont d’aucun secours pour Céleste. Qui subit. Le talent de Léonor est d’éviter toute caricature du bourgeois antipathique, de son épouse éthérée ou de domestiques muets. Lorsque Céleste accouche d’un garçon, il sera le fils du notaire et de Victoire. Mais, dans le huis-clos de la demeure, la jeune bonne et l’épouse se sont rapprochées, faisant fi des barrières sociales, portées par une révélation qui les entraînera loin de ce que la vie leur réservait initialement.

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 Les internautes l'ont lu

déception

L’écriture est très belle, toute en finesse, c’est vrai. Pourtant, je ne suis pas d’accord avec le fait que Léonor évite toute caricature. Certes, elles sont réalisées toute en délicatesse mais ce n’en sont pas moins des caricatures pour autant. L’histoire ne m’a pas réellement transportée et j’ai été déçue. Peut-être que j’en attendais trop mais je n’ai pas vraiment trouvé le scénario original, et quelque chose m’a gênée, manqué. Dommage.

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J’avais beaucoup entendu parler de Léonor de Recondo sans avoir encore osé lire un de ses livres. Aussi quand j’ai vu cette belle couverture dorée et ornée de papillons multicolores à la librairie, je n’ai pas tellement hésité à l’acquérir. J’ai lu le prologue, à peine sortie du magasin, quasiment en apnée, assise sur un banc en attendant mon mari. J’ai tout de suite été emportée par le style de l’auteure.

J’ai continué ma lecture un peu plus tard, et j’ai finalement terminé le livre sans faire de pause, j’ai tourné les pages sans voir le temps passer, tellement j’étais charmée : tout m’a plu dans ce roman, le thème, les personnages, la manière d’écrire de Léonor de Recondo.

J’ai aimé la sensualité qui se dégageait de ce texte, comme si l’auteure composait une mélodie suivant la cadence du corps et des émotions de Victoire et Céleste, les deux femmes au coeur de roman. La plume de Léonor de Recondo est sublime. le choix de raconter au temps du présent rend chaque instant plus beau et plus unique encore. Les chapitres courts ajoutent à la musicalité du roman. J’ai savouré chaque page au rythme des amours contés dans ce livre. Léonor de Recondo n’a pas son pareil pour nous parler de désir et de sentiments au féminin. La découverte des corps et du plaisir féminin est racontée avec une grande sensibilité et une grande tendresse. Cet amour entre Victoire et Céleste est impossible pour l’époque et pourtant elles vont vivre leur passion. Amours, au pluriel, l’amour d’une mère, celui d’une femme, celui entre deux femmes, mais aussi l’amour inconditionnel, impossible, et la passion.

J’ai lu ce livre il y a quelques mois, j’ai mis du temps à poser mon ressenti avec des mots, tellement j’ai été touchée par ce roman. Amours ne sera sans doute pas mon dernier livre de Léonor de Recondo. Une pépite littéraire ! Un livre sublime que je recommande sans hésiter.

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coup de coeur

L’amour au temps de la belle époque

L’action se déroule à St-Ferreux-sur-Cher en 1908. Elle a pour cadre une maison bourgeoise habitée par Anselme de Boisvaillant, un notaire, notable à ce titre de son village, qui a conclu il y a déjà plusieurs années un mariage arrangé avec Victoire, jeune femme issue également du cercle des notabilités locales. Elle habite cette demeure avec son époux, des domestiques, dont une certaine Céleste. Cette dernière est l’objet de visites secrètes de la part d’Anselme qui se terminent par des rapports sexuels forcés, particulièrement odieux et douloureux aux yeux de Céleste.
Parallèlement, Victoire est révoltée, secrètement, par sa condition de femme soumise, son éducation puritaine qui lui interdit l’accès véritable à la nudité, à son corps, à sa féminité ; elle qualifie ainsi les rapports sexuels conjugaux «d’enchevêtrement immonde ». Tout se dénoue lorsque Victoire aperçoit Céleste dans sa chambre, vêtue de l’un des corsets de la maîtresse de maison.Victoire la trouve belle, séduisante, sans s’avouer la véritable nature de son sentiment vis-à-vis de Céleste.

Cette dernière tombe enceinte, d’Anselme, et pour sauver les apparences, Victoire décide de faire croire à une fiction : l’enfant est d’elle, le père, c’est Anselme, ainsi préservé du terrible doute de stérilité qu’il nourrit en son for intérieur.
Après des premiers jours difficiles, l’enfant est sauvé. Victoire décide de le voir chaque soir et de s’asseoir près de Céleste, comme pour manifester à l’enfant une tendresse et un amour communs. En fait, ce qui se révèle à Victoire, c’est la prise de conscience de son corps, la force de l’amour pour une autre femme. Cette relation est décrite finement par Léonor de Recondo, par la précision des détails, la concision des descriptions ; ce qui fait d’Amours un roman particulièrement fort, attachant, car il n’est jamais dans l’excès, toujours dans la justesse de ton et une restitution impeccable de la psychologie des personnages, de leurs ressentis respectifs.
C’est aussi un défi aux barrières sociales de classe, aux convenances hypocrites, un hymne à l’émancipation féminine, pas vraiment à l’ordre du jour à cette époque, qui ne concevait guère de rôle pour les femmes à part celui de génitrice et d’épouse soumise.

C’est ce que vivent Céleste et Victoire dans des lieux inhabituels pour toutes deux : « Dans la lumière feutrée de chez Maxim’s, les amours se font et se défont dans l’indifférence la plus totale. Céleste et Victoire ont en franchi le seuil, passant de l’extérieur bien pensant, à un intérieur où la volupté dévoile la promesse d’une vie où l’on pourrait s’aimer sans contrainte. »
Beau roman, bien construit, d’un style au plus précis, comportant un grand sens du détail. A lire absolument.

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coup de coeur

Variation virtuose sur le thème de l’amour

« Sous les tuiles de la maison bourgeoise, quatre personnes sont couchées, seul l’enfant dort. Les autres gardent les yeux grand ouverts. Chacun dans sa pièce, chacun dans sa solitude profonde, hanté par des rêves, des désirs, des espoirs qui ne se rencontrent pas, qui se cognent aux murs tapissés, aux taffetas noués d’embrasses – métrages de tissu qui absorbent les soupirs pour n’en restituer qu’un écho ouaté. »

Je pourrais m’arrêter là, me contenter de vous offrir ces quelques mots, certaine qu’ils vous mèneraient directement à l’envie de lire ce magnifique ouvrage. Un petit bijou. Délicat, fin, précis. Tout juste couronné du prix des lecteurs RTL- Lire ce qui devrait doper ses ventes et ce n’est que justice. D’un point de départ a priori plutôt banal, l’auteure développe un récit lumineux, plein de grâce et de sensualité et pourtant pas exempt de brutalité, celle qui naît des différences de conditions.

Nous sommes en 1908, ce début de XXème siècle annonciateur de progrès mais encore pétri de traditions et de contraintes. Victoire de Champfleuri est devenue Madame Anselme de Boisvaillant trois ans auparavant par la grâce d’un mariage arrangé par ses parents, trop heureux de trouver ce beau parti – un notaire ! – pour une de leurs nombreuses filles. Veuf, Anselme attend de sa jeune épouse la production d’un héritier sans toutefois mettre tout le cœur nécessaire à l’ouvrage. Il préfère nettement trousser la petite bonne, Céleste, jeune fille de dix-sept ans convaincue que sa condition ne lui permet pas de refuser. Ce qui devait arriver arrive. Céleste se retrouve enceinte de Monsieur. Victoire, une fois la surprise passée se laisse guider par un certain pragmatisme. L’enfant sera le sien et tous les problèmes seront réglés… Oui, mais. C’est compter sans les mystères de l’amour. Céleste, issue d’une famille nombreuse n’a jamais eu l’impression de compter pour quelqu’un. Victoire, enfermée dans le carcan des faux-semblants de son milieu n’a jamais laissé libre cours à ses sentiments, et l’instinct maternel a du mal à se frayer un chemin parmi toutes ces couches de vernis social. En partageant le petit Adrien, elles vont accéder à une merveilleuse révélation, celle de l’amour, sous toutes ses formes.

Secrets de famille, secrets d’alcôves, bien-pensance, carcan de la religion… L’auteure dynamite le gentil milieu de la bourgeoisie à coup de phrases qui coulent toutes seules, laissant Victoire découvrir et apprendre à aimer son corps et Céleste accéder à la plénitude dans la satisfaction d’avoir enfin joué un rôle. Amour filial, conjugal, charnel, maternel ou spirituel, il s’agit bien d’une variation virtuose sur ce thème pourtant mille fois interprété.

Assez parlé. Lisez-le, dégustez-le, savourez-le. Plutôt deux fois qu’une.

Retrouvez nicole G. sur son blog  

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coup de coeur

«Amours» Des pages d’une beauté envoûtante

Le livre s’ouvre sur un premier chapitre très fort. Anselme, le maître de maison y viole Céleste, sa bonne. Quelques pages plus loin, on comprendra que cette scène est celle de la conception d’Adrien, l’enfant qui est bien involontairement le déclencheur de cette histoire.
Nous sommes en 1908, à un moment où les droits des femmes étaient balbutiants, pour ne pas dire inexistants. Le droit de cuissage sur le «petit personnel» faisait partie de ces règles non-écrites, y compris en province. Ce qui pourrait donc être considéré comme un faits divers banal va prendre sous la plume de Léonor de Récondo, une toute autre dimension. Car Victoire, la femme délaissée, va se rapprocher de Céleste. L’une et l’autre vont découvrir que leur corps peut être autre chose qu’un outil de travail, qu’il peut aussi être vecteur d’émotions : « L’amour est là, où il ne devrait pas être, au deuxième étage de cette maison cossue, protégé par la pierre de tuffeau et ses ardoises trop bien alignées, protégé par cette pensée bourgeoise qui jusque là les contraignaient, et qui, maintenant leur offre un écrin. »
Pour quelques instants, le désir balaie la morale. Victoire décide d’adopter l’enfant, se remet au piano, part à Paris s’acheter une toilette et se fait accompagner par Céleste.
Mais cette liberté nouvelle est menacée. Le poids des conventions, le regard des autres, l’impossibilité de vraiment s’émanciper vont conduire au drame.
Mais au-delà de ce récit, c’est pour son style qu’il faut se plonger dans ce roman. Léonor de Récondo cisèle ses phrases, les travaille et retravaille jusqu’à ce que sa petite musique soit parfaitement harmonieuse. C’est bien simple, il est très difficile de ne pas quitter le livre jusqu’à la fin. Et il ne s’agit pas ici d’une formule. A l’image de cette clairière vers laquelle Céleste part se réfugier, on trouve dans ces pages une beauté envoûtante.

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coup de coeur

Madame Bovary survitaminée

Hou, là, là…. Une plongée dans une famille bourgeoise du Cher, début 20ème siècle. Tous les clichés sont présents. La jeune bonne est violée par son patron, ce n’était que chose normale à cette époque ! Que faites-vous du droit de cuissage ! et, bien sûr, un fruit mûri dans le ventre de Céleste. Le couple, lui, Anselme de Boisvaillant, notaire et notable bien ancré dans sa vie, paillard, mais juste ce qu’il faut ! Elle, Victoire, jeune femme évanescente qui connaitra une défloraison à la hussarde. Pas facile de découvrir ce côté-là de la vie de couple lorsque la mère, soucieuse de la marier s’était empressée d’en gommer l’aspect charnel.
Clin d’œil de Léonor de Recondo au roman de Flaubert, Madame Bovary qu’elle met entre les mains de Victoire. Mais là s’arrête toute ressemblance.
Victoire a eu le cran et l’audace de clamer à son cher mari, la vérité sur Céleste. Elle résiste et ne veut pas la chasser et élèvera l’enfant comme le sien. Ce sera SON fils puisqu’elle ne connaîtra jamais les douleurs de l’enfantement. Petit à petit, une autre relation se noue entre les deux femmes.
Dans ce livre, Léonor de Recondo se joue des clichés chers aux livres « édifiants » de cette fin 19ème, début 20ème. Le bourgeois qui use de son droit de cuissage envers une bonne, l’enfant du pêché, le retour à la foi et la fin édifiante (j’ose le mot) de la pécheresse. Car oui, bien sûr, la bonne est pécheresse. Mais entremis, l’auteur joue une autre partition avec toujours le même talent, la même minutie, la même écriture ciselée. A chaque page, l’auteur m’a captivée, aucun personnage n’est lisse, la tension va crescendo jusqu’à la limite de la folie. La plus forte n’est pas celle que l’on croit.
Un livre où l’auteur parle d’amours charnel et maternel, pas seulement des amoures du mari. Elle nous raconte de façon intelligente les mœurs de l’époque sans jamais donner dans le voyeurisme. Un très bon livre. Décidement, Léonor de Recondo est un auteur que j’apprécie vraiment beaucoup. Pietra Viva, Rêves oubliés m’avaient déjà envoûtée.

Retrouvez Zazy sur son blog 

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Très réussi

Nous sommes au tout début du XX° siècle dans une maison bourgeoise, les apparences sont très lisses mais cachent une tout autre réalité, évidemment. Le roman commence sur une scène forte, le maître de maison qui violente sa jeune bonne. Tout est normal ! Aussi dingue que cela puisse paraître aujourd’hui, c’étaient là des moeurs sinon admises, du moins très tolérées en 1908. D’ailleurs lorsque la maisonnée découvre la grossesse de Céleste, ce n’est pas une surprise pour l’autre domestique (qui a déjà avorté moult fois), et cela ne provoque aucun drame : le bébé passera pour celui du couple, c’est que ça tomberait même bien, dis-donc, la descendance n’ayant pas l’air d’arriver (au bout de deux ans de mariage) (en même temps, la procédure nécessaire a l’air de tellement peser à Madame…). Cependant, et c’est heureux, la naissance de ce fils bousculera tout, à commencer par les rapports entre Madame et Céleste (et de belle manière)… Ne pas se fier à mon petit ton qui n’est en rien représentatif de ce très joli roman, qui m’a surprise par son élégance, sa fluidité et sa dextérité à raconter une histoire plutôt banale d’une manière qui saisit son lecteur du premier au dernier mot.

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