L'étrangère
Valerie Toranian

Editions 84
mai 2015
253 p.  7,30 €
ebook avec DRM 6,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Papiers d’Arménie

Aravni tricote pendant que Valérie prend des notes. Tandis que la grand-mère agite ses aiguilles, elle laisse échapper quelques bribes de son histoire, répondant parcimonieusement aux questions que sa petite-fille lui pose sur sa vie, son enfance, sur l’Arménie, la fuite de son pays, l’arrivée en France… Une maille à l’endroit, une maille à l’envers, un passage hier, un autre avant-hier. Valérie Toranian alterne le récit de son enfance avec le passé qu’elle a reconstitué au moyen des miettes recueillies auprès de la vieille dame qui baragouine le français.

La déportation, les camps, l’holocauste… Personne ne met en doute la souffrance des juifs, ne minimise cette tragédie. Mais pour les Arméniens, c’est une autre affaire : leur drame a été englouti par le torrent du siècle et, contrairement aux Allemands, les Turcs ont toujours nié leur responsabilité, récusant même le mot de génocide.  

Dans ces conditions, comment ne pas éprouver de la tristesse, de la rage même, lorsque que les siens ont tout perdu, lorsque tant sont morts et que l’oubli menace.

L’Arménie a toujours été présente, omniprésente même, dans la vie de Valérie Toranian à cause, justement, de cette grand-mère dont elle retrace le destin. Aux côtés de cette vieille dame pas commode, à la personnalité forte, parfois même revêche tant elle s’est battue pour subsister, on découvre ce qu’en 1915, les Arméniens ont subi.

Et puis, en contrepoint, d’une plume plus légère, devenue journaliste Valérie Toranian raconte sa propre enfance entre une mère, blonde aux yeux bleus, terriblement française, et un père terriblement arménien. A mi-chemin entre le roman, puisqu’elle a été obligée d’inventer une partie de l’histoire de sa famille, et l’autobiographie, Valérie Toranian signe un livre formidable, délicat et poignant, entre saga et récit intime.

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