Petite Soeur la Mort
William Gay

Le Seuil
cadre noir
mars 2017
272 p.  19,50 €
ebook avec DRM 13,99 €
 
 
 
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nuit blanche

Engoulevents

Je découvre William Gay avec ce livre. Ami de Cormac Mc Cathy, excusez du peu, amateur de Faulkner (il lui emprunte ce titre), adoubé par Stephen King, son pedigree est suffisamment intéressant pour se pencher sur cette histoire de fantômes et d’horreur.
1785, sud des Etats Unis, un chariot, un homme kidnappé, une mystérieuse destination, un monstrueux épilogue : la première scène tient de Tarantino autant que de Tim Burton, période Sleepy Hollow. Le cadre est planté, bien noir comme celui de la collection lancée par les éditions du Seuil. Le ton est donné, le style s’impose : parce que nous sommes bien là en présence d’une langue remarquable, bien servie par la traduction de Jean Paul Gratias, une langue qui place le livre directement en grande littérature, et non en littérature de genre. On est bien chez Faulkner, ou peu s’en faut, on est dans ces légendes, ces tensions, ces transpirations qui habillent les cauchemars, qui dressent les potences.

« L’homme avait cessé de se demander où il se trouvait. Le cri des engoulevents bois-pourri lui indiquait que la nuit était tombée.(…) Il était sûr d’avoir traversé un bois ; une branche l’avait frappé durement, lui balafrant le visage. Un filet de sang avait gelé le long de la plaie et durci comme une estafilade laissée par un ongle pointu. »

C’est pas tous les jours que l’on croise des engoulevents bois-pourri en littérature. De genre ou pas d’ailleurs. Ca vous donne une indication déjà sur la musique qui s’annonce, sur le climat qui l’emportera, d’inquiétude et de trouille, de peur et d’effroi. Quand le style s’impose aussi vite, l’auteur prend d’un coup vie, épaisseur et importance.
William Gay maitrise son récit, épaissit le silence aussi bien que la nuit, il s’y entend pour nous filer les jetons, et ce n’est pas toujours chose réussie dans ce type de littérature. Il s’impose à la nuit.
Dépassez donc l’illisible et totalement ratée couverture de ce livre (contrebalancée par l’excellente préface de Tom Franklin) plongez vous dans ces bois, ces histoires extraordinaires d’un autre temps, une sorcière au moins vous attend, peut-être pire. Peut-être la gueule béante d’un serpent mocassin.

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