Top réalité
Donald Westlake

Traduit par Pierre Bondil
Rivages
février 2014
288 p.  21,80 €
ebook avec DRM 7,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

quand Westlake prend la télé réalité pour un joyeux polar

C’est presque un cas d’école. Sur le quatrième de couverture de ce polar, on lit : « Donald Westlake a exploré tous les genres de la littérature policière, du plus burlesque (avec son personnage de Dortmunder) au plus glacial (avec celui de Parker qu’incarna à l’écran Lee Marvin) ». En regardant de plus près, on constate que ce livre est paru en 2009, alors que la télé-réalité (sujet du livre) était encore en vogue. On sait aussi que Donald Westlake est mort d’une crise cardiaque le 31 décembre 2008 à San Pancho au Mexique: drôle d’endroit et de façon pour finir l’année et le reste pour un New Yorkais de Brooklyn, surtout un auteur de polar aussi avisé et prolifique que lui. Résultat des courses : ce livre posthume paraît en France six ans après la mort de son auteur et personne ne s’en étonne, tant sont parfois abscons, obscurs et impénétrables les parcours éditoriaux.

Né à Brooklyn en 1933, Donald Westlake est devenu écrivain professionnel à 25 ans. Il a misé sur la qualité et l’originalité des intrigues (témoin celle de « Adios Sheherazade » en 1970) et sur la quantité (il a utilisé dix-sept pseudonymes, le plus connu étant celui de Richard Stark). Il a surtout opté rapidement pour l’humour (dès « Le Pigeon d’argile », son 6ème livre en 1965), car, selon cet expert, l’humour est un bon moyen « pour faire naître l’émotion et la peur ». Grâce à l’humour (chez Westlake, nettement plus américain que british), est apparu John Dortmunder, sorte de voleur-cambrioleur gaffeur qui est devenu l’un des personnages récurrents de l’œuvre.
Dans « Top Réalité », ce polar sauvé des eaux et du temps, Dortmunder est amené à jouer dans un film de télé-réalité avec ses complices habituels, et notamment Stan Murch, dont la mère est chauffeur de taxi. Le producteur Doug Fairkeep est en train de vivre une sorte de calvaire. Titrée « Le Stand », l’émission consacrée au monde paysan, bute sur une impossibilité : son héros vient de découvrir qu’il est gay et qu’il ne peut épouser l’héroïne. Cela risque de tout faire capoter. Heureusement que Dortmunder et ses acolytes arrivent avec une solution de rechange : ils proposent au producteur de filmer en direct un de leurs forfaits. La bande y trouve son compte et surtout un double avantage : 1) elle reçoit un beau cachet 2) elle pourra voler en sous main quelque chose dans l’immeuble où on tourne (reste à trouver quoi). Tout fier de pouvoir montrer en direct un mauvais coup, Doug Fairkeep ne sait pas dans quel guêpier il s’est fourré. Dortmunder et ses copains non plus. Avec talent et habileté, Donald Westlake décortique cet avatar de télé-réalité.
Il retombe toujours sur ses pattes et le lecteur ne s’ennuie pas une seconde. En plus, ce livre est presque le premier polar non-violent de ce début de siècle. Une douceur qui fait quelque part presque peur…
 

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