Croire au merveilleux
Christophe Ono-Dit-Biot

Gallimard
blanche
mars 2017
240 p.  20 €
ebook avec DRM 13,99 €
 
 
 
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o n  l  a  r e l u

revoir la Paz?

Selon le Larousse, le merveilleux est « ce qui s’éloigne du cours ordinaire des choses, qui est miraculeux ou surnaturel ». Faut-il y croire ?
Au début du livre, César n’y croit plus assurément. La disparition de sa compagne Paz l’a terrassé. Il veut en finir. Mais une rencontre, fortuite à priori (ce qui ressemble au hasard souvent est un rendez-vous… ), la survenue d’évènements divers, les réminiscences entêtantes d’un passé heureux ainsi que le savant mélange de tout cela à la fois, vont lui ouvrir les portes de l’extraordinaire… de ce qui s’éloigne de plus en plus du cours des choses, de leur dureté (les attentats, la douleur de l’être perdu …) ou de leur banalité (l’éducation d’un fils, le quotidien), lui permettre de s’approcher du surnaturel (renouer avec son passé ? ) et peut-être d’atteindre et de toucher le merveilleux…
C’est à la recherche de cette quête envoutante que nous convie l’auteur, de Paris à Amalfi au sud du Vésuve, en passant par de minuscules îles grecque et japonaise, à la recherche d’un passé studieux et amoureux, et de réponses aux questions que le survivant se pose : m’aimait-elle ? serait-elle revenue ? (Paz a disparu accidentellement lors d’un voyage mystérieux dont le narrateur ne sait pas vraiment s’il était définitif ou non).
Ce « merveilleux » baigne dans la mythologie grecque, omniprésente dans ce véritable jeu de piste (ce labyrinthe ?), dans ses histoires sensuelles et cruelles, dans son imaginaire ensorcelant, dans ses lieux fondateur. Et c’est là que personnellement, j’ai trouvé – paradoxalement peut être – une limite à l’intérêt du récit. On est trop proche de l’œuvre documentaire pour adhérer tout à fait à l’œuvre romanesque. Au fur et à mesure que l’on avance, la mythologie se substitue à une histoire qui s’étiole, ce qu’a sans doute recherché l’auteur pour atteindre au merveilleux mais nuit à mon sens à l’entreprise littéraire. Ce que le réalisme magique sud-américain de Cent ans de solitude parvient à atteindre, Croire au merveilleux n’y parvient pas…, mais dans un cas le surnaturel ne constitue qu’une toile de fond pour mieux souligner l’argument de l’œuvre (le temps qui passe), dans le second, il finit par se substituer à l’œuvre elle-même.
Livre brillant et érudit. Intelligent et raffiné, remarquablement écrit. Mais manquant pour moi d’un élément essentiel : le souffle d’un récit qui porte l’œuvre et la sublime.

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coup de coeur

Coup de coeur

Christophe Ono-Dit-Biot est un écrivain qui me « parle au cœur ».
J’aime ses histoires pleines d’amour, de sensibilité, de chagrin, de deuil mais aussi de bonheur et d’espoir.
Avec une écriture poétique et imagée, il sait me bouleverser avec des histoires simples.
Avec lui, il ne m’est pas difficile de « Croire au merveilleux ».

Dans ce dernier roman, j’ai eu plaisir à retrouver César et Paz et à « Plonger » dans un immense amour à jamais détruit.
César ne se remet pas de la mort de son épouse, la présence de son petit garçon ne réussit pas à combler l’absence.
Au moment où il décide d’en finir, le destin en décide autrement en la personne de la voisine qui vient sonner. Elle est jeune, jolie, se prénomme Nana, se dit passionnée par la littérature grecque, tout comme César.

C’est vrai que présenté comme ça, on peut penser à une histoire un peu mièvre parfumée à l’eau de rose, mais non, croyez-moi, nous en sommes bien loin.
« Croire au merveilleux », c’est accompagner un homme meurtri dans un très beau voyage intime pour renaître dans le cœur d’un enfant qu’il négligeait faute de se sentir capable d’en être le père.

Cette histoire est belle, les mots sont justes pour décrire et magnifier les sentiments. J’ai aimé les personnages avec leurs failles, leurs doutes, leur immense besoin de protection.

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S’émerveiller… et vivre heureux!

J’ai été complètement charmée par le dernier livre de Christophe Ono-Dit-Biot : Croire au merveilleux, un roman solaire, sensuel, mythologique, magique, mystérieux qui m’a littéralement envoûtée. J’en ai aimé la langue simple, pure et la beauté des descriptions des lieux et des corps.
Le narrateur César a perdu sa femme, Paz , qui s’est noyée dans des circonstances qui resteront assez mystérieuses. Il lui reste son petit garçon. Mais malgré tout l’amour qu’il a pour cet enfant, il ne parvient pas à surmonter sa peine et décide de se suicider. « Aujourd’hui je vais mourir. Je ne suis pas malade. Je ne suis pas ruiné. Je n’arrive plus à vivre, c’est tout. Amputé à ce point, est-ce qu’on peut même employer le mot : vivre? » Avalant un à un les cachets qu’il a préparés, il est soudain interrompu par la sonnette de sa porte d’entrée : titubant vaguement, il se décide à ouvrir et découvre une jeune voisine qu’il n’avait jamais rencontrée. Elle s’appelle Nana, a oublié ses clefs et attend son frère. Elle entre dans l’appartement et découvre la collection de Budé que possède le propriétaire des lieux. Elle semble très érudite pour son âge, au grand étonnement de César et elle lui demande si elle peut lui emprunter La Théogonie d’Hésiode. « Un poème du VIIIe siècle avant Jésus-Christ qui raconte la création du monde et les batailles entre les dieux et les monstres, je doute que cela vous serve dans la France d’aujourd’hui » lui fait remarquer le narrateur mais elle repart comme elle est venue, laissant un César un peu perdu, comme arrêté dans son élan : « ce n’est plus le moment propice, le kaïros, comme disaient les Grecs de l’Antiquité pour qualifier cet espace entre le trop tôt et le trop tard. »
Abîmé dans ses pensées, César se dit qu’il a l’intime conviction d’avoir vu ailleurs cette jeune fille énigmatique… Mais où ?
Alors, commence une aventure qui va mener le narrateur (et nous par la même occasion) de Paris à Marina di Praia sur la côte amalfitaine, au site archéologique de Paestum, puis de la Grèce au Japon, toujours vers la lumière, vers une renaissance par l’art, la littérature antique, le merveilleux des contes et de la mythologie, seuls capables de reconstruire les êtres brisés, de les ramener à la vie.
L’auteur, comme un magicien, fait renaître en nous l’enfant que nous étions, émerveillé par les histoires de dieux et de héros, nous rappelant par là même que c’est précisément cette capacité à s’émerveiller qui fait l’adulte que nous sommes, apte à affronter un monde souvent violent, d’y vivre malgré tout, de s’y construire et d’y être heureux.
Et cette faculté est un bien précieux qu’il faut conserver en soi le plus longtemps possible et surtout transmettre à nos enfants afin qu’ils sachent puiser en eux la capacité de surmonter leurs peines en goûtant la beauté qui les entoure.
Un texte qui donnerait presque des ailes pour voler là où la mer et le ciel se confondent, où l’odeur de la menthe, du romarin et du basilic nous enivre, où ne rien faire et rêver sont les seules activités possibles…
Ça vous dit ? Allez, on y va !

Lire au lit : http://lireaulit.blogspot.fr/

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Après Eros, Thanatos

« Croire au merveilleux » de Christophe Ono-dit-Biot est la suite de « Plonger » sorti il y a quelques années. On peut le lire sans avoir lu le précédent mais il manquerait alors, à mon sens, une dimension à cette lecture. Celle-ci n’est entière qu’en confrontant les deux récits.

Dans ce second « chapitre » de l’histoire, on retrouve César et sa façon de survivre à la disparition de Paz et à l’absence de réponse liée à son départ brusque : Paz avait-elle l’intention ou non de revenir ? Le doute dans lequel César doit rester le ronge et le pousse à envisager le pire : le suicide 2 ans après la mort de Paz, malgré la présence d’Hector, leur fils, 6 ans.

Malgré la mort de Paz qui planait sur tout le récit, le premier volet de l’histoire racontée par César avait trait à Eros, portant l’amour de deux êtres humains, sublimés dans la naissance d’un enfant et qui pourtant s’étiole. Ce second volet est l’envers du décor, le revers de la même pièce : Thanatos prend toute son ampleur et toutes ses aises à travers le désespoir morbide de César.

Tout le livre est une double quête. Tout d’abord, celle de la réponse à la question « avait-elle prévu de revenir ? ». Ensuite, celle de la réponse à la question, corollaire de la première, « Paz m’a-t-elle envoyé un signe ? ». César est bien le seul à ne pas voir en Nana le signe envoyé par Paz à César.

A partir du moment où le lecteur comprend ce signe et assimile que « Croire au merveilleux » est le pendant thanatonique de l’érotonique « Plonger », le second livre prend tout son sens et le plaisir de lecture n’en est que plus décuplé. Plaisir précédemment perturbé par le côté parfois démonstratif des souvenirs de César et donc un peu (beaucoup) de l’auteur : à travers ses nombreux voyages, Christophe Ono-dit-Biot fait partager ses expériences au lecteur, une manière de les revivre et de les faire vivre…

Et pourtant, il y a parfois quelque chose d’artificiel à se dire que certes l’auteur les a vécues pour nous les faire partager mais que décidément c’est un petit peu prétentieux de systématiquement dénicher les meilleurs endroits, les meilleurs citrons, les plus belles vues, les plus beaux sites…

Ce petit bémol mis à part et qui se dissipe au fil de la lecture, on y retrouve toute la passion de l’auteur pour l’hellénisme, les mythes et les symboles qu’il travaille, triture, digère pour nous et qu’il habille du costume de la fiction romanesque. Le tout avec une virtuosité magnifiée par le fond.

Le diptyque formé par les deux livres de Christophe Ono-dit-Biot recèle d’une myriade de références à la culture grecque que ce soit à travers les prénoms des personnages, Nana, Dita, Zio, les navires qui portent les noms des muses, la forme des îles, le nom de la bière ou encore le lexique employé par Christophe Ono-dit-Biot qui est à fond dans le registre antique, pour notre grand bonheur.

Ce livre s’interprète tout au long de la lecture comme un songe onirique, divin et médiumnique, comme si les Dieux de la mythologie, après un silence qui s’apparentait à une disparition pure et simple, avaient décidé d’intercéder en faveur d’un de leur plus fervent admirateur, passionné d’une civilisation passée mais pas passéiste et au contraire porteuse d’un message symbolique pour le futur.

L’auteur nous invite à croire en quelque chose de supérieur à notre enveloppe charnelle, en une sorte d’allégorie de la vie qui doit nous mener vers une sérénité que le monde actuel n’est pas prêt à nous offrir sur un plateau. Alors même si cet opus est un ton en-dessous de merveilleux « Plonger », suivons-le…

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