La louve
Paul-Henry Bizon

Gallimard
blanche
août 2017
256 p.  20 €
ebook avec DRM 14,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Roman des champs, roman des villes

Au début de cette « Louve », on se croit embarqué dans un roman paysan contemporain au côté de Romain, le personnage central qui, issue d’une famille de bouchers prospères décide de se lancer dans une agriculture très exigeante, que pour simplifier nous qualifierons de bio.

l’écolo et l’escroc
Passionné, Romain se bat contre tout et contre tous, les habitudes des agriculteurs, la grande distribution et surtout son frère ainé qui incarne pour lui une consommation et une agriculture qu’il juge dévoyées. Voila pour le côté champêtre.
Côté ville, et précisément à Paris, on fait la connaissance de Raoul Sarkis. On comprend vite que l’on a affaire à un escroc de la plus belle eau qui, comme tous les escrocs, dégage une énergie et un charisme qui séduisent les plus méfiants.
Sarkis, qui se fait passer pour richissime, lance un projet pharaonique, en plein cœur de Paris, dans un lieu immense et splendide, autour de la gastronomie française et de ses produits d’exception avec restaurants branchés et commerces de bouche (sur le modèle de Eatalia, pour ceux qui connaissent).
Évidemment il lui faut des producteurs d’exception et c’est là que s’opère la rencontre entre notre cultivateur utopiste et notre escroc aussi authentique qu’un topinambour bio. Se déploie alors une intrigue proche du thriller qui tient le lecteur en haleine jusqu’à la fin.

Comme un film de Sautet
Il y a du Claude Sautet chez Paul-Henry Bizon. Qu’il s’agisse de cette France rurale où l’agriculture tente de se réinventer ou de ce Paris de bobos entreprenants qui vous parlent, sans craindre le ridicule, de l’émotion que leur procure la douceur incomparable d’un navet, on se laisse prendre par ces ambiances justes.
Par les personnages aussi. Ils ne s’appellent pas Vincent, François, Paul et les autres, mais ces femmes amoureuses, ces financiers véreux, ce journaliste intègre, ces frères qui ont tant de peine à s’aimer peuplent avec sincérité ce roman, inattendu et original qui renvoie une image bien réelle de notre monde chamboulé.

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 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Pour son premier roman, Paul-Henry Bizon, diplômé de la Sorbonne et qui s’intéresse particulièrement aux problèmes (urbains ou agricoles) de mutations des écosystèmes, n’a pas choisi un sujet facile.
En effet, « La Louve » traite de l’agroécologie, de permaculture, de coopératives paysannes, de la difficulté à concilier l’authentique avec les nouveautés apportées par le progrès. Celui-ci, d’ailleurs, est une grande source de magouilles pour trouver du profit à tout prix et même au détriment de la santé des consommateurs.
Mais en Vendée, Camille Vollot et sa compagne Victoire, vont choisir de se lancer dans une agriculture biologique. Camille vient de connaître un drame familial avec le suicide son frère Antoine et il lui reste Romain avec qui il ne s’entend pas du tout. Deux frères, deux visions différentes.
Soutenu financièrement par une femme qui croit en lui et en ses projets (Anne-Marie Perrault, sa mécène en quelque sorte), il crée un groupement de producteurs, « La Louve » (c’est d’ailleurs le surnom qu’il donne à Victoire), avec un objectif, redonner le goût du vrai, du simple, du bon sans fioritures, face à un Raoul Sarkis, personnage véreux qui ne pense qu’au « fooding », la mal-bouffe, mais qui rapporte tellement.
Camille va se heurter à des tentatives de sabotage, d’arnaques financières. Il va devoir également se battre contre l’hostilité des grands céréaliers et des éleveurs de bétail qui ne recherchent, eux aussi, que l’argent facile.
« La Louve » est un livre basé sur les valeurs familiales, l’écologie, la permaculture… Et ce n’est pas facile d’écrire un tel livre sur ce thème.
On peut dire aussi que malgré tout, c’est un sujet bien d’actualité car le monde a déjà bien du mal à nourrir tous ses habitants et où grand nombre d’individus meurent encore de faim.
Mais ce qui est très réaliste, c’est cette recherche à vouloir faire évoluer les mentalités et cela m’a remémoré le combat de Pierre Rabhi, fondateur du mouvement « Colibris » et qui a été reconnu comme un expert international pour la sécurité alimentaire.
C’est en cela que j’ai trouvé que « La Louve » de Paul-Henry Bizon s’en rapproche car les valeurs, les idéaux sont les mêmes.
Mais quels combats sont nécessaires et le Bien arrivera-t-il à vaincre le Mal ?
C’est donc un livre très intéressant pour le lecteur qui se sent concerné par ce problème qui, de toute façon, grandit de jour en jour.
Le lecteur ne devra pas trouver rébarbatif le récit lorsqu’il est question d’agroforesterie, de cultures associées… Au contraire, c’est très instructif et il est rare de lire un ouvrage aussi particulier mais qui n’oublie pas d’y ajouter quelques touches d’amour, d’une profonde sensibilité et d’une bonne étude des caractères.

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