Rabot
Adrien Girault

L'Ogre Editions
l'ogre
janvier 2018
201 p.  18 €
ebook avec DRM 9,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Chasses silencieuses

Dans un premier roman, on cherche une voix singulière, une langue et un univers inédits, dont on reconnaît parfois les influences. Les éditions de L’Ogre ont déniché un nouveau talent, Adrien Girault, qui publie une fable inquiétante entre Cormac McCarthy et Maurice Pons.

Le narrateur vit chez sa grand-mère, dans un bourg où il est garde champêtre. Il plane sur le village une menace émanant du château du comte, dont les chasses font l’objet de sombres rumeurs : des restes humains auraient été retrouvés enterrés aux alentours du domaine. Le père du jeune homme, un ancien ami du comte, est lui-même mort dans des circonstances suspectes. Alors que la mère du narrateur est en visite, un homme élégant sonne à la porte. Déjà perturbé, notre héros, au comble de la nervosité, s’éclipse. Pressentant un danger imminent, il quitte le village et disparaît, rejoignant la ville où sa sécurité est aussi en péril, puisqu’une catastrophe s’y est produite quelque temps auparavant. Là, il se joint à un groupe d’hommes errants qui dorment la nuit dans les forêts ou dans des maisons abandonnées, devenant à son tour un survivant au milieu de l’apocalypse qui a vidé la ville de ses habitants.

La tension qui émane de ce roman tient à son intrigue énigmatique. Outre l’emprise et le danger que constituent le comte et ses pratiques chasseresses barbares, on ne peut faire confiance à personne : certains villageois sont de mèche avec le « saigneur » qui exerce un pouvoir hérité de son père. Disparitions, menaces larvées, règlements de comptes, on avance dans un climat pesant et mortifère auquel le héros se soustrait en prenant une route non moins périlleuse vers une calamité urbaine d’origine inconnue. Le flou légendaire et dystopique semé d’indices entretient notre curiosité ; une lecture entre les lignes résultant d’une narration qui s’interroge en même temps qu’elle informe. On est aimanté par le style travaillé, haché parfois, qui avance à grandes foulées vers un dénouement poétique. Ce jeune auteur racle sa prose au rabot jusqu’à l’os, mais gare aux échardes…

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