La fin : Allemagne (1944-1945)
Ian Kershaw

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mai 2014
665 p.  14,50 €
 
 
 
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coup de coeur

jusqu’au dernier

Dans ce livre apocalyptique, Ian Kershaw tente de comprendre en nous l’expliquant l’autodestruction du régime nazi et de l’Allemagne à partir de la tentative d’assassinat d’Hitler en juillet 1944. Le 20 juillet 1944, Hitler échappe de façon miraculeuse à un attentat planifié par des conjurés militaires. A partir de cette date et jusqu’au 8 mai 1945 Hitler va radicaliser son action et entraîner son parti, son armée et son pays dans une destruction sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Généralement, une armée se sentant proche de la fin, négocie sa capitulation afin de limiter la casse et de préserver les hommes et le matériel. Il n’en a rien été pour l’Allemagne nazie : à partir de cette date, Hitler va faire régner une terreur sans précédent sur les siens, c’est-à-dire le peuple aryen : soldats et civils. Le traitement jusque-là réservé aux « races inférieures » : Juifs, Polonais, Tziganes, Russes … va s’appliquer au peuple allemand, aux « ubermenschen », Hitler s’engage dans une logique de folie destructrice. Et rien ni personne ne l’arrête ; chacun va jouer son rôle à son niveau jusqu’à la fin. Qu’on en juge : chaque mois, l’armée allemande perd 350 000 hommes ! La moitié des soldats allemands tués pendant la guerre, l’aura été au cours de ces 10 derniers mois, 500 000 civils seront tués par les bombardements alliés. La terreur des civils en Prusse orientale face à l’arrivée de l’Armée rouge fut extrêmement importante ; tout le monde connaissait les abominations perpétrées par la Wehrmacht sur les territoires de l’est, et chacun savait que les Russes vouaient une haine terrible contre les Allemands et désiraient se venger. Pourtant, l’évacuation des civils face à l’avancée soviétique tarde à venir : les Gauleiters appliquent à la lettre les directives de Hitler et emprisonnent, pendent, exécutent tous déserteurs ou civils défaitistes. Quand l’évacuation de l’est de l’empire commencera, il sera trop tard, les convois de civils allemands se traîneront sur les routes dans les températures glaciales de janvier 1945 ; ils seront facilement bombardés et difficilement acceptés par les villes plus à l’ouest. Les Russes massacreront des populations civiles dans les villes et villages pris. Les bombardements des Américains, des Anglais et des Soviétiques, réduiront à néant de nombreuses villes et villages qui auraient échappés à ce sort si Hitler avait négocié une reddition ; un magnifique patrimoine perdu à jamais. L’objectif de capitulation sans condition des alliés, la peur des soldats russes, l’humiliation de la défaite de 1918 très présente chez Hitler expliquent en partie cette auto destruction. La violence physique et morale exercée par le parti nazi à tous les niveaux contre toute tentative de rébellion est également une explication de cette situation. Le III° Reich étant réduit à la ville de Berlin, les combats entre Allemands et Russes se déroulant rue par rue, maison par maison, Hitler attendra malgré tout le dernier moment, l’instant ultime avant de se suicider, envoyant encore les derniers jours des gamins déguisés en soldat à une mort certaine. La ville en partie détruite, les civils terrés dans les caves, les déserteurs pendus aux réverbères, les cadavres jonchant les rues, donnent une vision de cette dernière bataille. Mon grand-père Francisque, prisonnier français au Stalag III D Kommando 703, libéré de son camp par l’arrivée de l’armée rouge, se trouvait caché dans l’une de ces caves, avec d’autres camarades français ; ils regardaient passés par le soupirail les bottes allemandes qui couraient suivies de bottes soviétiques. Lorsque la porte de la cave a été ouverte brusquement d’un coup de pied, ils n’ont eu que le temps de lever les mains en l’air et de crier « Frantsuzskiy, Frantsuzskiy ! » : le soldat russe qui les visait avec sa mitraillette n’a pas tiré et ils ont eu la vie sauve.

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