Haine pour haine
Eva Dolan

Traduit de l'anglais par Lise Garond
Points

448 p.  8,10 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Une nation face à ses démons

Dans une ville terne et ingrate du centre de l’Angleterre, un groupe d’immigrés est fauché par une voiture folle. On suspecte un acte raciste. La police ouvre une enquête, confiée à un tandem issu lui aussi de l’immigration… Un an après « Les Chemins de la haine », qui l’a comblée de récompenses, Eva Dolan remet son ouvrage sur le même métier. Décor, trame, atmosphère, les fondamentaux de « Haine pour haine » sont inchangés. Le lecteur conquis par son premier roman ne sera pas dépaysé. Le risque, c’est qu’il pourrait être tenté de comparer. Va-t-il juger la pinte de bière à moitié pleine, ou au contraire à moitié vide ?

L’auteure n’a pas choisi la facilité. Au travers du prisme policier, elle cherche à dépeindre une nation face à ses démons du moment. Isolationnisme et déclin, racisme et xénophobie. Pour sonder l’extrême-droite locale, l’inspecteur Zigic et sa partenaire, le sergent Ferreira, ont appris à se boucher le nez et à lire sous les politesses de façade. Pour interroger les marchands de sommeil et les employeurs au noir, ils ferment les yeux sur l’hypocrisie d’une économie parallèle à grande échelle. Une matière sociale qu’Eva Dolan maîtrise.

L’histoire ne manque pas de fond, le souci est le dosage. L’accumulation de morts et de suspects est aussi celle des stéréotypes, l’intrigue se dédouble et s’emberlificote entre crime domestique et crime politique. On y perd même de vue le tandem de flics serbo-portugais, parfaite alliance du froid et du chaud. Avec l’impression d’un message insistant : vous n’aviez pas saisi la première fois, on vous redit à quel point les nazillons locaux sont dangereux. Un peu comme si ce deuxième roman était l’ébauche du premier, celui où l’auteur se fait les dents et les griffes. Alors, dégustons la pinte à moitié pleine : si ce livre nous avait fait découvrir Eva Dolan, on l’aurait sans doute jugé prometteur.

 

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