Six degrés de liberté
Nicolas Dickner

Points
cadre rouge
janvier 2017
312 p.  7,50 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Une odyssée 2.0

Le nouveau phénomène littéraire québécois a pour nom Nicolas Dickner, qui publie là son troisième roman, Prix du Gouverneur général 2015 et grand succès de librairie. Ancré dans notre monde hyper-connecté, ce livre est une illustration de l’utilité de l’inutile. Une histoire haletante, des personnages attachants, une écriture soignée ; en un mot : génial !

Pirates, geeks et rêveurs

Lisa et Éric sont amis depuis l’enfance. La première habite pendant la semaine chez son père, un artisan qui retape de vieilles maisons, et passe les week-ends chez sa mère bipolaire qui voue un culte à l’enseigne suédoise IKEA. Le second est un petit génie de l’informatique, que son agoraphobie contraint à vivre cloîtré dans sa chambre. Ce duo aux airs de Géo Trouvetou québécois est inséparable, jusqu’au jour où, à quinze ans, Éric déménage avec sa mère au Danemark, laissant une Lisa désemparée et mélancolique. Parallèlement, Jay, ex-hackeuse en liberté conditionnelle, travaille pour la gendarmerie où elle est analyste de données aux fraudes économiques. Dans son service, on traque Papa Zoulou, un conteneur fantôme, une caisse de transport maritime qui se balade de port en port autour du monde sans qu’on puisse l’intercepter, connaître sa provenance, sa destination ni son contenu. Les spéculations vont bon train : déplacement de clandestins, cache d’armes terroriste, le mystère reste entier et le conteneur poursuit son périple.

Poétique du détournement

Dans ce roman, on croise des geeks, des esprits colonisés par la mondialisation et le capitalisme, des obsédés du code, mais que cela ne vous arrête pas, car ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, et Nicolas Dickner pilote très bien son lecteur (parole d’ignorante en la matière !). Il ne s’agit rien de moins que de s’ouvrir à la beauté du monde. Pour y parvenir, la technologie aide nos personnages, qui en éprouvent aussi les limites et savent s’en affranchir. Dans un monde globalisé, standardisé, comment échapper aux radars des logiciels ? En ne renonçant jamais à la liberté individuelle et à l’imagination, en exaltant l’audace et la solidarité et en préservant l’anonymat. Cette odyssée 2.0 ne manquera pas de vous enchanter par son humour, sa poésie et son caractère à la fois ludique et très maîtrisé.

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