Jennifer Haigh
Traduit de l’américain par Janique Jouin-de Laurens
Editions Gallmeister
americana
mars 2017
435 p.  24,20 €
ebook avec DRM 16,99 €
 
 
 

l  e   b l o g   i  n  v  i  t  é   

Sylvie Sagnes  (blog Cunéipage)  a aimé
«Ce qui gît dans ses entrailles» de Jennifer Haigh (Gallmeister)  

«  C’est la grande leçon de la vie d’adulte de Rich, démoralisante : rien, mais rien, n’est simple. » A la manière d’un mantra ces cinq mots rythment  les déconvenues permanentes qui vrillent l’âme de Rich. Pauvre Rich, pour lui effectivement, « rien, mais rien, n’est simple ». Pourtant il y a cru, quand il est un jour rentré du boulot (il était de nuit, gardien de prison, le métier où on se douche après, geste signifiant dans la hiérarchie qu’il a établie) et qu’il a trouvé assis à sa table un homme l’accueillant par ces mots : « Belle propriété que vous avez là ». Rich a signé immédiatement, gaz de schiste ? Fracturation hydraulique ? Banco ! Tant que ça rapporte de l’argent et lui permet d’entrevoir un avenir pour sa ferme.

Pauvre Rich, qui a signé à 60 à l’hectare, quand les voisins plus méfiants ont obtenu plus tard jusqu’à 2500.

Pauvre Rich, empêtré dans un mariage instable, aîné d’une famille bancale, au double boulot qui leur permet tout juste de survivre.

Mais pauvre Pennsylvanie, surtout. 

Précédemment défigurée par l’extraction du charbon, du fer et du pétrole, polluée par l’accident nucléaire de Three Mile Island, et maintenant dévastée par la fracturation hydraulique.

A Bakerton, outre Rich et sa famille, c’est tout un monde qui s’agite sous nos yeux. Le pasteur, les ouvriers du gaz de passage, la serveuse du bar, les fermières voisines, une infirmière, un médecin, un activiste, un avocat et la cohorte de leurs histoires personnelles se croisent, s’entremêlent avant de bifurquer, produisant peu à peu une impression d’interconnexion totale et ne manquant pas d’évoquer un parallèle avec notre façon de traiter la terre.

Bien sûr, tout est lié et nous sommes tous connectés, pour le meilleur et pour le pire, par les pipelines et les fils électriques, la poussière de charbon et les fumées de gaz.

Jennifer Haigh le détaille ici brillamment, directement dans la lignée de Richard Russo, avec une grande bienveillance envers ses personnages. 

« Ce qui gît dans ses entrailles » est à la fois un roman social et engagé (le côté individus contre gros groupes, « La fille de Brest » ou « Erin Brockovitch ») et une chronique chaotique moderne et mordante, d’une justesse totale quel que soit le thème abordé.

Un roman époustouflant.

Sylvie Sagnes présente Cunéipage

Blogueuse un jour, blogueuse toujours : littéralement « la page de Cuné », le blog Cunéipage tient son nom du pseudonyme délicieusement désuet dont j’usais depuis mes débuts sur le net (Cunégonde). Créé un matin de l’hiver 2006, il m’accompagne depuis dans ma passion de la lecture. Chronophage, addictif et porteur de nombreuses joies, son unique but est le partage autour de mes meilleurs amis : les livres, les librairies et les bibliothèques.
https://cuneipage.wordpress.com

 

 
 
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