Mères filles, sept générations
Juliet Nicolson

traduit de l'anglais par Eric Chédaille
Christian Bourgois Editeur
litterature etr
février 2017
375 p.  23 €
ebook avec DRM 17,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Libre ou pas ? Là est la question

Les femmes de cette famille étaient dotées d’un sacré tempérament, d’un étonnant sens de la liberté, elles se souciaient peu des convenances (en tout cas sexuelles) et étaient douées pour toutes sortes de choses. Juliet Nicolson ressuscite sept générations de mères et de filles allant de 1830 à 2015 dans un récit sans complaisance, sincère et très romanesque.

Avec « Portrait d’un mariage », son père, Nigel Nicolson, avait déjà dévoilé pas mal de choses sur ses propres parents, Vita Sackville-West et Harold Nicolson. Vita et Harold s’aimaient et s’entendaient à merveille, mais Vita appréciait aussi beaucoup les femmes et Harold éprouvait un indéniable penchant pour les hommes. Vita tomba très amoureuse de Violet Trefusis, tout juste mariée, et les deux maris partirent récupérer leurs épouses pour les ramener au bercail. La vie reprit simplement comme avant… C’était l’époque du groupe de Bloomsbury et cette dualité sentimentale ne choquait (presque) personne, en tout cas cela choquait moins que de se marier hors de sa condition. Si Vita Sackville-West reste la plus célèbre de la famille, elle s’inscrit cependant dans une lignée haute en couleurs débutant avec Pepita, une danseuse de flamenco qui ensorcela Lionel Sackville-West.

« Dans notre famille, une des réactions à l’impression d’être prise au piège fut de s’enfuir, quitte à abandonner des enfants en bas âge », écrit Juliet Nicolson. C’est l’autre face de cette glorieuse médaille, la version moins glamour de cette saga. Les mères avaient tendance à quitter le navire lorsqu’elles le sentaient tanguer. Elles noyaient leur solitude, leur angoisse ou leur mal être dans l’alcool. La mère de la narratrice, étouffée par deux mariages malheureux, se tua à petits feux à coup de champagne (son deuxième mari était très riche), et Juliet elle-même, en réchappa de peu.

Ce qui est passionnant dans ce récit, en dehors du fait qu’il nous raconte  l’histoire de l’Angleterre, enfin d’une certaine Angleterre, sur presque deux siècles, c’est qu’il retrace aussi l’histoire des femmes, avec d’un côté celles qui bravèrent les conventions, de l’autre celles qui ne purent s’en dépêtrer, prises dans un conflit inextricable entre leur éducation et leurs désirs. De véritables héroïnes, courageuses et lâches à la fois, enthousiastes et désespérées, présentes et défaillantes selon les moments de leur vie.

partagez cette critique
partage par email

Libre ou pas. Là est la question

partagez cette critique
partage par email