Ici on s’ennuie ferme. Le titre ne mentait donc pas: rien d’alléchant à se mettre sous la dent. Tout s’annonçait bien pourtant, pensez plutôt: un voyage au cœur de la dictature la plus opaque et la plus dangereuse du moment, avec un ami excentrique (dont l’utilité narrative s’avérera nulle ) et l’ambition affichée de prendre des risques – des carnets cachés dans le double-fond d’une valise et rédigés à la hâte dans l’intime pénombre des WC de l’hôtel – afin de nous dévoiler l’ambiance donnée à voir au voyageur de passage. Admettons. Mais tout se gâte vraiment lorsque le lecteur se voit servir, en lieu et place de révélations, des poncifs à la louche, répétés en boucle (les habitants sont fantomatiques, ils évoluent dans un décorum de carton-pâte où tout transpire la facticité), des digressions interminables sur Melville (le moment poético-intellectuel de l’ouvrage pour le cas où on le confondrait avec un Guide du Routard) et des considérations géopolitiques que toute personne documentée pourrait formuler depuis son fauteuil. Et l’on va même jusqu’à s’agacer devant ce voyageur qui, tel Don Quichotte n’écoutant que son courage, n’hésite pas à mettre sérieusement en danger les trois guides chargés de le surveiller, en refusant systématiquement ou presque de se conformer au programme établi. Et pour couronner le tout, une écriture indigente, pour le moins. Qui a dit « beaufitude » ?