ÔBA Tsugumi
1er volume d'une série de 20
Kana
Bakuman
juillet 2010
192 p.  6,85 €
ebook avec DRM 4,99 €
 
 
 

illustration Brigitte Lannaud Levy

Voilà une reconversion professionnelle des plus originales. Après des années comme psychologue en milieu hospitalier à accompagner les malades d’Alzheimer et leurs proches, Mickaël Brun-Arnaud a mis sa blouse blanche de côté pour vivre son rêve d’enfant  et devenir libraire spécialisé dans l’univers Manga. Après six mois de formation à l’INFL et un stage de fin de formation, c’est le 5 mai dernier qu’il a ouvert sa magnifique librairie dans le quartier estudiantin de la faculté de Jussieu. Cette librairie est magnifique, nous pesons nos mots. Poussez la porte et vous basculez dans un univers qui ne vous est pas totalement étranger quand vous aimez les films du génie de l’animation japonaise Hayao Miyazaki, créateur de « Princesse Mononoké », « Le château dans le ciel » et autres chefs d’œuvre.  Mickaël Brun–Arnaud souhaitait recréer l’atmosphère des films du fondateur du célèbre studio Ghibli dans un savant mélange  de décoration victorienne, de références à l’écologie et à l’imaginaire. Un choix de décoration qui tranche avec l’univers des librairies spécialisées  dans ce domaine qui empilent le plus souvent les nouveautés dans un environnement assez impersonnel où les outils de promotion prennent tout l’espace dans un esprit de « Fast-reading ». Ici c’est tout le contraire. Tout est joli, délicat, pensé et propice à la flânerie, au rêve et à la découverte. Si l’enseigne porte le nom de Renard Doré c’est que l’animal est l’un des sujets les plus courants du folklore et des contes japonais. Appelé Kyūbi no kitsune, il gagne une queue supplémentaire par siècle et devient renard au pelage doré, doté de neuf queues ayant ainsi gagné sagesse et puissance. Et si sur la façade, ce fameux renard est représenté en Origami, c’est parce que la librairie propose un espace dédié aux ateliers créatifs de type origami et  furoshi-ki (origami en tissus pour faire des emballages) animés par Kim Quach la Fée, une plasticienne origamiste. Y sont aussi proposés des cours de dessin de type manga, des rencontres autour des livres, des dédicaces. « Une librairie, ce ne sont pas que des livres sur des étagères, il faut qu’il s’y passe des choses pour donner aux gens l’envie de revenir » nous déclare Mikaël Brun-Arnaud qui nous reçoit pour nous livrer ses conseils de lectures… Manga bien sûr.

Commençons par les plus jeunes, que nous conseillez-vous pour les 6-10 ans ?
Un manga que nous plaçons en jeunesse, mais qui peut plaire aussi aux adultes, «Minuscule » de  Pakito Kashiki (Editions Komikku). L’histoire d’Hakumei et de Mikochi, de petites créatures pas plus grandes que des insectes, qui vivent dans la forêt au sein d’une micro civilisation. L’une est cuisinière, l’autre construit des habitations. Leur quotidien est riche d’aventures qui offrent aux enfants une initiation aux enjeux qui se posent à toutes les sociétés : élection, écologie, organisation… L’auteur a une finesse de trait et son univers imaginaire est d’une grande richesse.

Dans la catégorie d’une lecture manga qui fait du bien que nous recommandez-vous ?
Un very feel good manga qui s’intitule « Ma vie dans les bois » de Shin Morimura (Editions Akata) . Alors que cela fait des décennies qu’il conçoit et réalise des mangas, l’auteur approchant de la cinquantaine s’est retrouvé en manque d’inspiration. Il décide de se lancer dans un projet fou. Tout quitter, abandonner ses possessions matérielles et partir vivre en autonomie alimentaire dans la montagne sans eau courante, sans électricité et raconter ce nouveau mode de vie éco-responsable dans un manga.   Tout devient prétexte à rire des situations toutes plus hallucinantes les unes que les autres. Un manga qui nous permet de mesurer qu’il y a une autre vie que celle des écrans, des tablettes, et de la société de consommation.

Il existe une catégorie de mangas dits historiques. Que pourrions-nous lire dans ce domaine?
« Innocent » de Shi’ichi Sakamoto (Editions Delcourt). Nous sommes au 18e siècle, on suit le destin de Charles Henri Samson  exécuteur des hautes œuvres de Paris, autrement dit bourreau.  Suite à la paralysie de son père bourreau, il est dans l’obligation de prendre cette charge qu’il ne désire pas, mais dont il hérite.  Il enchaîne les exécutions qui, sous la révolution, sont nombreuses. Le problème c’est qu’il déteste cela. Le graphisme est aussi sublime que les scènes peuvent être d’une grande cruauté. Et ce paradoxe comme celui de la détestation du héros pour son métier en fait un manga fascinant. Pour les passionnés d’Histoire, on apprend plein de choses et pour découvrir le manga c’est une bonne initiation.

Quel est le livre-culte le plus emblématique de la librairie que vous défendez avec ferveur ?£
C’est une série de vingt tomes « Bakuman »  (Editions Kana) écrite par Tsugumi Öba et dessinée par Takeshi Obata. C’est l’histoire d’un collégien très doué pour le dessin, neveu d’un mangaka qui a connu un immense succès avant de tomber dans l’oubli.  Mashiro est amoureux d’une fille de sa classe. Un copain lui propose  de créer un manga . Dans l’atelier de son oncle défunt, ils vont le créer  avec l’idée, s’il parvient à réaliser une série à succès, qu’il épousera son amoureuse. C’est une lecture passionnante pour qui souhaite découvrir comment on réalise un manga.

Quel est le livre que vous vous êtes promis de lire ?
« La magie du rangement illustré » de Marie Kondo (Kurokawa Éditions). Un de nos best-sellers sur une méthode de rangement qui améliore le quotidien. Il est sur notre comptoir, mais avec quinze arrivages de mangas tous les deux jours, je n’ai pas encore pris le temps de le lire.

Un conseil en littérature japonaise ?
« Konbini » de Sayaka Murata (Denoël), inspiré de l’histoire vraie d’une jeune femme qui souffre de troubles autistiques. Elle travaille dans un Konbini, une supérette ouverte 24 heures sur 24 où le travail est d’une infaillible régularité qui la rassure. Son entourage s’inquiète, car elle vit seule sans conjoint sans enfant. Un jour, arrive au Konbini, un employé aussi peu fiable que déstructuré qui se fai rapidement virer. Entre ordre et désordre une histoire se noue entre eux. Avec l’héroïne qui va le recueillir,  ils vont tous deux convenir d’un arrangement…C’est un chef-d’œuvre de la littérature moderne japonaise. Il se lit en une heure, mais laisse une impression durable.

Une brève de librairie
Mieux qu’une brève, je voudrais dire merci, à tous ceux qui, depuis l’ouverture, se sont impliqués dans la librairie alors que je ne les connaissais pas. Merci à eux pour leur engagement…  en écrivant des critiques sur les livres, en participant aux animations, en m’aidant à installer les chaises pour les rencontres et bien d’autres soutiens. Merci à tous ces gens qui se sentent ici comme chez eux et qui chaque jour apportent les couleurs et les sourires nécessaires à ce lieu de rencontres et de vie.

Propos recueillis par Brigitte Lannaud Levy
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Librairie Le Renard doré
41 rue de Jussieu
75005 Paris
01 42 02 14 85

 

 

 
 
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