La maladroite
Alexandre Seurat

Editions du Rouergue
rouergue litter
août 2015
112 p.  13,80 €
ebook avec DRM 6,49 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Se souvenir de Diana…

Diana est maladroite. Etait, plutôt. C’est ce que vont évoquer à tour de rôle celles et ceux qui auront traversé la courte vie de cette fillette : ses maladresses, chutes répétées et autres blessures pour en attester… Dès le début de ce court roman, le doute n’est pas de mise, son institutrice s’effondre en voyant l’affiche de la disparition de Diana. Puis, lui succède la voix de la grand-mère, la première à observer l’équilibre vacillant au sein du foyer de sa fille, ses interrogations devant les explosions des parents envers sa petite-fille. Des voix d’adultes, plus ou moins proches de Diana, alternent, s’interrogeant sur la possible violence dont elle est victime. La spirale qui conduira, inéluctablement, au drame, se dessine dans les phrases de la tante, dans celles de la mamie, des instits, des directrices d’école, des travailleurs sociaux et même, des gendarmes. Car, plus que la description sensible d’un fait divers tristement banal, l’auteur rassemble les témoignages, compile les interrogations des spectateurs plus ou moins conscients de ce qui se passe. Chaque protagoniste s’explique, se rappelle, se justifie parfois. Sans réelle mauvaise foi, ni d’auto-apitoiement. Comment deviner la maltraitance ? Quelle part de confiance accorder aux parents ? La sincérité est de mise, le plus souvent, rendant encore plus bouleversante cette lecture.

Un premier roman d’une force inouïe, sensible et intelligent, qui vous remettra en mémoire le calvaire vécu par Marina (morte en 2009 dans la Sarthe, sous les coups de ses parents condamnés en 2012).

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 Les internautes l'ont lu

Diana : la petite princesse maladroite

Dès la première page, on retient son souffle : il est déjà trop tard. L’enfant est condamnée. Pourtant, Diana est une petite fille souriante et affectueuse, certes un peu maladroite, ce qui explique tous ces bleus sur son corps. Mais ses proches ont des doutes. Ils prennent la parole tour à tour pour évoquer le quotidien de l’enfant : institutrices, médecins, assistante sociale, tante, grand-mère… Tous font preuve de bonne volonté pour sauver Diana, mais demeurent impuissants. Et pour cause ! Des parents polis, des frères et sœurs bien élevés, des explications pour chaque blessure et des déménagements successifs retiennent la machine administrative.

Tragédie ? Malchance ? Concours de circonstances ? On est entraîné dans une spirale sans issue. Auraient-ils vraiment pu la soustraire à ses bourreaux ?

Ce que réussit Alexandre Seurat avec brio, c’est d’émouvoir sans pathos. La maladroite ne dénonce pas, n’accuse pas. Inspiré d’un fait divers, la monstruosité est silencieuse et les sévices infligés à Diana suggérés. Dans ce roman choral, une voix émerge timidement : celle du frère. À la fois témoin complice et victime indirecte de cette maltraitance sourde, il incarne cette impuissance qui croît au fil de la lecture.

Un drame sublimé par la fiction. Un premier roman bouleversant, tout en sobriété.

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nuit blanche

roman coup de poing

Le roman s’ouvre sur l’institutrice de Diana, petite fille de 8 ans, qui découvre l’avis de recherche de son ancienne élève disparue. Immédiatement elle a compris. Elle se remémore les bleus, les fractures, le comportement de l’enfant et pense que tous ceux qui ont déjà croisé la route de l’enfant savent qu’elle n’a pas disparue, qu’il est déjà trop tard.

Dès le deuxième chapitre, la parole est donnée, sous forme de témoignages très factuels, à la grand-mère et à la tante de l’enfant, premiers témoins du drame familiale, de gestes brusque, d’un sentiment de gêne oppressant qui vous fait comprendre intuitivement que l’enfant est en danger.

Et puis, vient la voix de sa première institutrice qui comprend, prévient, se bat, dont le regard de l’enfant l’obsède. La directrice de sa première école, le médecin scolaire. Et on sent que le roman s’emballe exactement de la même manière qu’une radio pu un présentateur télé pourraient énumérer la liste des manquements de l’éducation nationale, le corps médical, le système. Les témoignages s’enchainent: institutrice et directrice de la nouvelle école, un médecin, deux médecins, autre institutrice, assistante sociale, le grand frère. Et tout au long de la lecture, au rythme des procédures, des signalements, des convocations des parents, on se dit, présentant le fin tragique : « mais dépêchez vous elle va mourir ». Et elle meurt bien sûr. Parce que la petite Diana, inspirée par tant de faits divers, est en réalité tous ses enfants morts sous les coups dont le journal de 20h ne cesse de raconter les ratés du système : la petite Marina morte à 8 ans, le petit Nolan 2 ans et demi dont le visage violacé n’a fait que semer des doutes chez le pédiatre qui l’a ausculté, Léni, l’insupportable calvaire de la petite Typhaine 5 ans et plus récemment Bastien mort dans le tambour de la machine à laver mis en route par son papa pour le punir….

Un livre coup de poing. Terrible. Terriblement juste.

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coup de coeur

Un récit coup de poing

Un premier court roman d’Alexandre Seurat qui semble fort attendu pour cette rentrée.

Il part d’un fait divers, un procès qu’Alexandre Seurat avait suivi. Il l’a marqué, poursuivi et est le point de départ de ce récit choc remarquablement mis en mots (monde) ; un récit coup de poing qui bouscule, dont on ne sort indemne.

J’en suis sortie K.O. Un récit parlant d’un sujet brûlant : la maltraitance parentale. Je vous rassure il n’est pas question de voyeurisme, ce n’est pas pathos. Le sujet est traité avec beaucoup de pudeur.
C’est la description d’un destin sans précédent, un destin qui apparait au fil de la lecture comme une évidence, sur lequel il était impossible d’interagir.

Diana est une petite fille de huit ans. Elle a disparu. Un avis de recherche est lancé. Celles et ceux qui l’ont croisée durant sa courte vie vont prendre la parole et témoigner.

Une écriture magnifique, sous forme d’un roman choral. Tour à tour chacun témoignera de ce qu’il a vu, des initiatives mises en place pour sauver Diana, en vain.

La violence du récit n’est pas dans les descriptions des sévices de son quotidien, pas du tout, ce n’est pas le sujet central. La violence vient des sourires et des silences de Diana.

Il n’y a pas de surenchère émotionnelle, tout réside dans les faits. Entre réalité (revendiquée par l’auteur) et fiction, axé sur les émotions, un roman coup de poing qui nous fait prendre conscience de la nature humaine, de l’impuissance, du déni et de la manipulation. A découvrir sans plus attendre.

Ma note : un grand coup de ? , coup de poing

Les jolies phrases

C’est tellement bien écrit que j’avais envie d’en noter à chaque page, en voici quelques-unes.

Une famille bricolée, oui, une famille rapiécée, une famille où rien ne se dit, mais où les drames se passent au vu de tous, et en silence, sans que personne ne s’interpose.

Paralysée en raccrochant, parce que je n’avais pas fait ce qu’il aurait fallu, pas dit ce qu’il fallait comme il fallait.

p29

J’ai cessé d’enseigner – la décision, c’est ce qu’il y a de facile, le soulagement de rompre, de se dire, « Plus rien ne sera plus pareil », tout brûler compense les regrets qui vous brûlent, il y a une ivresse.

J’aimerais pouvoir dire que je l’aimais comme une soeur – mais elle n’en était pas une pour moi, puisqu’elle n’était RIEN… (105)

Rtrouvez Nathalie sur son blog 

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