Dans la forêt sombre et mystérieuse
Winshluss

Gallimard Jeunesse
hors serie bd
octobre 2016
160 p.  18 €
ebook avec DRM 12,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Angelo au pays des prodiges

Aventurier et scientifique, l’école normale pour les 6/11 ans, Angelo a la tête au carré et une paire de lunettes. Logique pour un futur savant. Une mini-houppette le situe entre Titeuf et Tintin. Sa famille est ordinaire, un grand frère et une petite sœur aimés par des parents modernes. Aussi, quand la mémé se meurt, l’aventure débute « pour de vrai ». À la faveur d’une pause étape sur l’aire d’autoroute, Angelo s’éloigne du véhicule familial, lequel reprend son chemin sans se rendre compte de l’absence du gamin.

Rencontres improbables

S’engage alors une aventure contemporaine empruntant aussi bien à l’Alice de Lewis Carroll qu’à la princesse Mononoké de Miyazaki, en passant par le couple d’ogres des frères Grimm. La nuit tombée, la peur venue, une luciole obèse qui a « trop mangé de macdo ? » guide Angelo à l’intérieur d’une grotte. Puis un labyrinthe le dirige dans un autre monde, la tête à l’envers. « Dans la forêt sombre et mystérieuse », les rencontres sont improbables.

Fabrice, un écureuil travesti en oiseau inapte au vol, à son grand regret, tombe à ses pieds. « Les écureuils ramassent des glands » lui répète son père, aussi tous les talents d’inventeur du jeune Angelo et un ballon de baudruche décoré d’un large sourire parviendront à faire décoller Fabrice. Plus fabuleux encore, Goouh, incarnation du principe de vie, créateur de Nature, qui rappelle le dieu-cerf de Princesse Mononoké. Poursuivant sa quête, Angelo tombe sur Franky le gros crapaud à cigare et Jojo l’asticot, deux sympathiques arsouilles qui lui révéleront les mystères de la forêt. Paradisiaque jadis, elle fut détruite par de cupides entreprises à la recherche de « la source de vie », une espèce d’élixir de jeunesse, à forte plus-value. Spoliés de leurs terres, les habitants furent chassés et l’environnement détruit : d’où la Vallée du désespoir. Au bout du chemin, la confrontation avec l’ogre affamé, vêtu d’un costume de banquier, se clôt par un combat final et manichéen entre l’ogre, à la mort, et Goouh, à la vie. Et puis les retrouvailles familiales s’organisent au chevet d’une sympathique Mémé prête à ressusciter grâce à la source de vie.

En compétition à Angoulême

Winshluss est le pseudonyme de Vincent Paronnaud. Auteur de bande dessinée,cinéaste, il est récompensé en 2007 à Cannes par le Prix du Jury pour sa participation (énorme) avec Marjane Satrapi à Persépolis. Ce film d’animation recevra ensuite le César du meilleur premier film et celui de la meilleure adaptation (d’une bande dessinée).

Winshluss, c’est aussi, et surtout devrions-nous préciser, le lauréat du fauve d’or, le prix du meilleur album à Angoulême (2009) pour sa reprise débridée du Pinocchio de Collodi. Avec cette adaptation, il revisite le conte original et le dynamite. Winshluss a le sens de l’ellipse (l’espace entre deux cases) et de la composition de la page, un avantage en bande dessinée. Ça claque d’une case à l’autre. L’humour est omniprésent sans alourdir l’histoire, ce qui permet de faire passer le message aux plus grands. Son dessin s’inspire de l’école naturaliste du Disney des années 40. Winshluss dévergonde les petits Mickey tout en leur conservant une certaine innocence pré-adolescente, celle des 6/11 ans. À savourer jusqu’à la dernière page. Fabrice est cocasse.

«Dans la forêt sombre et mystérieuse » a remporté la Pépite d’or 2016 au Salon du livre de jeunesse de Montreuil, avant d’entrer en compétition pour Angoulême 2017.

 

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