Camille, mon envolée
Sophie DAULL

Le Livre de Poche
août 2015
192 p.  6,90 €
 
 
 
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coup de coeur

Quel courage Sophie Daull d’écrire ce témoignage d’amour, ce bel hommage à Camille.

Camille a seize ans, c’est une fille remplie de joie de vivre et soudain en quatre jours, à l’approche de Noël, la vie s’échappera peu à peu d’elle. Quatre jours remplis de courage, quatre jours de désespoir, d’impuissance, quatre jours de fièvre. Une mauvaise grippe ?

Malgré l’insistance et la prévenance de ses parents, juste une ordonnance de Doliprane sans qu’aucun médecin ne prenne la peine d’ausculter Camille. Des urgences inefficaces qui amèneront à l’envolée de Camille.

Que de rage, de fureur, de colère en lisant ce récit. Je salue encore le courage et comprend la nécessité de sa maman – Sophie Daull – d’écrire dans les semaines qui suivirent ce très beau récit pour rendre hommage à sa fille, un passage obligé, indispensable pour tenir debout et continuer à avancer.

Quelle écriture ! J’ai été très émue à la lecture, triste, révoltée, j’ai pleuré, je suis restée sans voix mais j’ai aussi souri car ce livre c’est aussi la vie, il est lumineux et positif.

L’écriture est forte, puissante.

La construction du roman est en deux parties. Une partie écrite « à chaud » dans un cahier d’écolier au moment du décès, la seconde s’étale sur les quelques semaines et mois qui l’ont suivi.

Le récit s’adresse à sa fille avec qui Sophie Daull, comédienne, partageait beaucoup du monde du théâtre. Elle lui raconte les réactions de chacun, des proches, jour après jour. Lui parle de l’attente des résultats de l’autopsie, de ce qui l’a au final emportée.

C’est un magnifique témoignage d’amour, une thérapie nécessaire pour amorcer une guérison, pour avancer, tenir. J’ai ressenti à la lecture de ce récit de l’espoir, du réconfort. C’est lumineux, un vrai puits d’amour sincère. Avec simplicité, précision, spontanéité mais aussi avec humour.

Un immense coup de coeur.

Les jolies phrases

Je supporte mal l’idée de vivre encore moins un temps long comme ta vie, seize ans. Et pourtant mon espérance de vie statistique m’y condamne à coup sûr.

Parce que maintenant, tu sais, tu as une auréole. Ce sont nos larmes, et l’onde d’amour autour de ta mort, et le vertige de l’injustice, et le souvenir de ta beauté qui l’ont tressée.

Ce sont des moments pleins d’inquiétude, avec des visions terribles qu’il faut chasser très vite, des boucles de malheur qui nous assaillent Delphine et moi, notre père, notre mère, l’intuition affreuse de la répétition, des ailes de la mort qui reviennent obscurcir la raison, masquer le soleil de la logique : une enfant de 16 ans ne meurt pas.

J’ai tout de suite compris que le silence de la pièce et la profondeur des fauteuils n’avaient d’autre raison d’être que d’amortir les mauvaises nouvelles, les très mauvaises nouvelles.

Dans cette maison, on s’aimait, on s’engueulait, on riait ; on était délicieusement libre de s’aimer, de s’engueuler, de rire. Ton jeune sang et le nôtre un peu plus épais formaient un fleuve intranquille où l’avenir battait pavillon.

Je voudrais te dire deux, trois minuscules choses qui te mettent au présent, qui mettent ta mort au présent, puisque ce souvenir durera toujours, qu’il faut que tu dures toujours.

Je n’ai qu’une envie, c’est d’être avec papa et continuer à écrire ce texte. D’être avec toi, donc écrire c’est te prolonger.

Une autre chose : nous n’avons pas de nom. Nous ne sommes ni veufs, ni orphelins. Il n’existe pas de mot pour désigner celui ou celle qui a perdu un enfant.

Pour la première fois une sensation d’un baume. Les larmes des autres tapissaient notre douleur, la matelassaient en quelque sorte.

Le vrai ravage c’est toi, toi qui n’es plus là. Trois c’est 2 + 1, maintenant c’est 2 -1. Tu butinais de l’un à l’autre, tu faisais la valeur d’équilibre, le fléau de la balance. Maintenant c’est le fléau tout court, et c’est le vide qui doit faire l’équilibre.

J’écris comme on dépollue les sols devenus infestés par une catastrophe industrielle.

Le niveau baissera-t-il un jour ? Et si oui, quel sera l’état des ruines après ton glissement de terrain ? Zone non constructible. Mon enfant morte, ma si belle chérie, ne laisse rien, surtout, repousser sur ton Pompéi. On est bien dans tes cendres.

Je voulais aller nulle part. Mais il n’y a pas de nulle part. Je le savais déjà mais, depuis que tu es morte, ça me manque vraiment, un endroit où disparaître.

Retrouve Nathalie sur son blog 

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