Féerie générale
Emmanuelle Pireyre

Points
août 2012
221 p.  6,70 €
ebook avec DRM 6,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Féerie loufoque

Lauréate du dernier Prix Médicis pour « Féerie générale », Emmanuelle Pireyre déclarait peu après sa nomination : « Je viens de la poésie et inventer des formes ne me fait pas peur. » Il suffit, pour s’en convaincre, de feuilleter cet objet étrange et hybride qui tient  bien plus de la performance artistique que du roman dans sa définition classique. Ce texte raconte pourtant des histoires, succession de sept contes modernes dont les héros évoluent dans un monde surconnecté et anxiogène. Il y a d’abord Roxane, qui délaisse ses cours de finance pour se consacrer à la peinture équestre, puis cette jeune musulmane résolue à ne pas imposer de limites à ses rêves, cet étudiant suédois qui aime la France « pour ses centres historiques et ses filles faciles » et ces artistes contemporains qui organisent des happenings pour réchauffer le luxe glacé de leur loft new-yorkais. La fiction devient le reflet d’une réalité qui n’a rien de futuriste, elle interroge sur les modes de consommation actuels et le sens à donner à sa propre existence. Si les questions faisant office de titres de chapitres semblent a priori totalement loufoques (« Comment laisser flotter les fillettes ? », « Comment faire le lit de l’homme non schizoïde et non aliéné ? », « Friedrich Nietzsche est-il halal ? « ), les développements, à la fois ludiques et savants renferment des interrogations bien actuelles et légitimes telles les perspectives écologiques pour notre planète, la remise en cause de la cellule familiale, la toute-puissance de la finance, le regard porté sur l’Islam et l’utilisation massive du cliché dans le langage écrit et oral. C’est effectivement contre toute forme de clichés et de lieux communs qu’Emmanuelle Pireyre part en croisade dans cet ouvrage mêlant oralité et tournures anciennes, récit traditionnel et langage texto, photographies et ébauches de courriels, le tout se succédant dans un joyeux désordre qui n’est pas sans nous rappeler notre quotidien et la façon parfois absurde dont la société contemporaine fonctionne.

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