La côte barbare
Ross Macdonald

traduit de l'anglais par Jacques Mailhos
Gallmeister
totem
octobre 2014
304 p.  10,50 €
ebook avec DRM 9,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Un classique du genre

Lire aujourd’hui Ross MacDonald dans sa réédition chez Gallmeister, c’est comme redécouvrir un film noir US des années 50, qu’on aurait toujours connu avec un doublage médiocre et des raccords qui sautent. Un jour, enfin, on le voit en VO et dans une copie restaurée. Il est toujours en noir et blanc, mais sans cassure entre les séquences. Et surtout, les acteurs ont des intonations qui donnent du sens à l’histoire et un accent qui colle avec le décor.

Oliver Gallmeister – éditeur en France de David Vann et de Craig Johnson – tenait ce Californien élevé au Canada pour un auteur-culte à l’égal de Dashiell Hammett et Raymond Chandler. Lorsqu’il a acquis les droits sur les 24 romans de MacDonald, il a réalisé à quel point les traductions françaises avaient jusqu’alors été massacrées, baclées, parfois même tronquées. Le traducteur maison, Jacques Mailhos, a fait oeuvre de restauration, rendant aux descriptions leur lyrisme originel et aux dialogues la finesse de leur ironie.

« La côte barbare » est le sixième titre ainsi proposé aux lecteurs francophones. On y retrouve le détective Lew Archer, auquel Paul Newman prêta ses traits dans deux adaptations. Engagé pour retrouver une jeune épouse volage, le privé s’invite dans un club nautique supposé sélect, sorte d’arrière-cour de Hollywood. En fait, l’endroit s’avère aussi accueillant pour les voyous et les séducteurs des deux sexes que pour les nababs du cinéma. Archer y trouve bientôt quelques cadavres dans les placards. Il tente alors de faire parler tous les familiers des lieux, histoire de trouver la faille ou de pousser un suspect à la faute.

C’est la méthode d’investigation des 50’s, où la parole vaut tous les gadgets et où le héros paie de sa personne sans compter. Cela donne un polar très dense, parfois théâtral, mélange d’énigme policière classique et de thriller psychologique, Archer recueillant une confession après l’autre entre deux échanges d’uppercuts avec les malfrats qu’il dérange. Le détective roule dans des berlines à grosse calandre et emprunte des vols où l’on fume et pourtant, l’atmosphère, le ton, l’humour du roman sont sans âge. Flic déçu, détective frustré, père et mari tourmenté, Ross MacDonald a canalisé dans ses livres ses angoisses et son mal-être. Des sources d’inspiration éternelles, qui les font résister au temps.

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