La nostalgie heureuse
Amélie Nothomb

Librairie Générale Française (LGF)
août 2013
160 p.  6,40 €
ebook avec DRM 11,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Faut-il lire « La nostalgie heureuse » ?

Beaucoup de banalités

En mars 2012, Amélie Nothomb est sollicitée par une équipe de télévision pour retourner au Japon, pays qu’elle avait fui deux fois mais qui marque profondément ses écrits et sa personnalité (elle y a vécu jusqu à l’âge de 5 ans, puis y est retournée pour ses premières expériences professionnelles décrites dans « Stupeurs et tremblements »). Ce reportage, réalisé pour France 5, sera l’occasion de retrouver sa nounou, ainsi que son premier amour, et de nous plonger à la manière d’un guide touristique dans ce Japon qui la passionne. Au fil de la lecture, on ne comprend pas pourquoi ce récit est étiqueté « roman » par l’éditeur. Des préparatifs jusqu’au voyage lui-même, l’auteure nous laisse découvrir son univers si particulier et ses émotions intimes (souvent bien banales surtout devant la monstruosité des dégâts de Fukushima). « Toute personne qui débarque dans la plus belle ville est tentée de prononcer quelques sottises. Et la tentation est encore plus forte quand on écrit à ce sujet », constate-t-elle à la page 73. Alors si Amélie Nothomb le reconnaît elle-même, que dire de plus devant ce qui ressemble à une succession de litanies, mais ravira certainement ses fans. On pourrait en rester là mais non… un miracle s’accomplit enfin dans les tout derniers chapitres. Elle nous fait partager un « Kensho » dans le quartier de Shibuya à Tokyo puis à bord de l’avion du retour au dessus de l’Himalaya. Il ne s’agit pas de la dernière boisson à la mode au pays nippon, mais d’une sensation extatique qui fait ressentir la force de l’indicible en se laissant porter par les éléments environnants. À ce moment-là, on devine l’imminence d’un recommencement gigantesque. Cette sensation très forte est extrêmement bien décrite. En la lisant, on éprouve toute la saveur de cette émotion intérieure et ces quelques lignes finales nous font un peu oublier toutes les platitudes qu’on a dû subir pour en arriver là.

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Faut-il lire « La nostalgie heureuse »?

Une langue épurée, un humour vif

On referme le 22ème roman d’Amélie Nothomb avec un plaisir mélancolique… et  une question de taille: faut-il chercher à ressusciter le passé ? Doit-on revenir sur les traces de nos bonheurs d’antan ? N’y a-t-il pas plus de coups à prendre que de joie à éprouver? Ce sentiment de félicité que nous procurent nos souvenirs n’est-il pas plus fort qu’un présent qui ne ressemble plus au passé ?

« La nostalgie heureuse » est sans doute l’un des livres les plus personnels de l’auteure. Elle nous dévoile ses fragilités et ses doutes, son manque de confiance en elle et nous révèle l’influence (parfois trop lourde à porter) qu’elle a sur ses lecteurs. Mais ses angoisses nourrissent son œuvre, toujours ponctuée de son humour pétillant et vif, dans une langue épurée, fuselée, précise et belle, très belle.

Amélie retourne au Japon en 2012, cette terre chérie, après 16 ans d’absence. Depuis lors, le sol qui l’a vue naître a tremblé, a été dévasté, et ne correspond plus à l’image qu’elle s’en faisait, telle qu’elle le rêvait. La première phrase du livre est révélatrice : « Tout ce que l’on aime devient une fiction. » Et un paradis perdu.

Elle revoit néanmoins les deux amours de sa vie d’alors : sa deuxième mère Nishio-San, « la femme sacrée », et son fiancé nippon Rinri. Elle redoute les retrouvailles. Elles se dérouleront, malgré l’émotion, plus facilement que prévu. En revanche, la séparation se révélera plus délicate : la première sera bouleversante et difficile, la seconde plus sereine. La vie est ponctuée de creux et de plein. Amélie, elle, se remplit de vide, cette vacuité qui l’apaise. Mais l’indicible reste toujours là. La romancière nous permettra-t-elle un jour, de percer son mystère ?

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