L'échelle de Jacob
Ludmila Oulitskaïa

traduit du russe par Sophie Benech
Folio
mars 2018
468 p.  10,90 €
ebook avec DRM 9,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Un roman formidablement russe

Ludmila Oulitskaïa nous offre une fiction autobiographique entremêlée à l’histoire de la Russie. Alternant le roman de Nora, double de la romancière, et celui de ses grands-parents, la narration dynamique possède un vrai souffle romanesque qui porte le destin d’une lignée de femmes indépendantes comme sait les peindre l’auteure de « Sonietchka ».

Des lettres oubliées dans une malle

Nora est scénographe et vit à Moscou ; bien qu’elle soit mariée, sa situation est celle d’une mère célibataire. En 1975, elle donne naissance à Yourik, le fils de Vitia, un génie des mathématiques introverti qu’elle a épousé par défi à la fin du lycée. Pour son malheur, l’homme de sa vie est marié, c’est un metteur en scène de théâtre géorgien : son amant épisodique. Peu après la naissance de son fils auquel Nora voue désormais sa vie, elle doit organiser les obsèques de sa grand-mère paternelle. Au moment de vider l’appartement de Maroussia, elle récupère ses nombreux livres, ainsi qu’une malle remplie de lettres et de carnets. Ce n’est qu’en 2011, un siècle après la première lettre envoyée par Jacob Ossetski, le grand-père qu’elle n’a pas connu, que Nora se décide à lire cette correspondance familiale.

Jacob, le pilier de la famille

Si Jacob a autant écrit, c’est à cause du service militaire puis des relégations dont il a été victime. Etudiant, il rencontre Maroussia, alors apprentie enseignante, à un concert. Leurs lettres témoignent de leur amour commun pour le théâtre et la musique. Alors que Maroussia intègre un corps de ballet inspiré par Isadora Duncan, Jacob devient économiste, mais sa véritable passion reste la musique. Durant vingt-cinq ans, et jusqu’en Sibérie, cet esprit libre et assoiffé n’aura de cesse de réclamer des revues et des livres, écrivant sur des sujets aussi divers que les statistiques, la judéité, l’histoire de la musique ou le symbolisme. Mais le couple ne résiste pas à l’éloignement ni au communisme radical de Maroussia. En remontant le cours de sa généalogie, Nora se découvre une proximité avec cet homme passionné par Tchékhov, qui parle du couple et de la fidélité, de la paternité et de la filiation, comme en écho à ses propres interrogations. Passionnant !

 

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