Kennedy et moi
Jean-Paul Dubois

Points
septembre 1997
 6,50 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu
coup de coeur

A la vie à l’amer

De J.P Dubois j’ai lu récemment « Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon », excellent roman, bien meilleur que son titre ! Du coup j’ai demandé à ma bibliothéquaire préférée de me dénicher un autre livre de cet auteur. Elle m’a proposé « Kennedy et moi », une publication parue vers la toute fin du siècle dernier je crois (oups, comme le temps passe !), le seul qu’elle eût en rayon. J’ai pris et je n’ai pas regretté !

Plongé depuis quelques années dans une dépression larvée qui pourrait être une « crise de demi-vie », Samuel Polaris, écrivain à succès, n’écrit plus. Pas plus qu’il ne s’intéresse à sa femme Anna, dont il connaît d’ailleurs la liaison avec un toubib de la clinique où elle travaille. Il constate aussi avec indifférence qu’il n’aime pas (ou n’aime plus ?) ses trois enfants, devenus trois jeunes adultes égocentrés qui s’apprêtent à quitter le nid. Il s’est immergé dans une oisiveté lucide et déterminée. Faute d’argent puisqu’il arrive au bout des confortables revenus que lui avait procuré son dernier roman, il s’apprête même à mettre fin aux consultations qu’il avait commencé du bout du coeur à suivre chez un psy, lesquelles ne lui ont fait aucun effet, ni en bien ni en mal…
Peut-être parce qu’il se sent près de toucher le fond, il pose un acte dont il avait envie depuis
longtemps : il achète un Colt 45 !
Est-ce le coup de pied qu’il donne d’instinct pour remonter vers la vraie vie, ou la dernière démarche avant le passage à l’acte ?
Pour le savoir, il nous faudra l’écouter se raconter à partir de cet acte fondateur et le voir se débattre avec (dans l’ordre ou à peu près si mes souvenirs sont bons) son rival, son psy, une rage de dent puis le dentiste qu’il consulte (une consultation croquignolette, accrochez-vous !), ses jumeaux geeks, sa fille orthodontiste et le futur gendre qu’elle lui impose.
Il nous faudra le voir renouer avec Anna un autre lien, alors qu’elle aussi prend conscience de passer un cap crucial. Le voir enfin accepter de se mesurer au temps qui reste, se lancer dans une course contre la montre (c’est le cas de le dire) dont l’issue ne fait aucun doute mais qui vaut peut-être d’être courue encore…

Caustique, subversif, déjanté et très accrocheur même s’il ne m’a pas spécialement remonté le moral, son parcours est mené tambour battant et son panache m’en a mis plein la vue. Je recommande !

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