Terres rares
Sandro Veronesi

traduit de l'italien par Dominique Vittoz
Le Livre de Poche
janvier 2016
480 p.  8,10 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

A bout de souffle

Cela faisait huit ans. Huit ans que nous n’avions plus de nouvelles de Pietro Paladini. Qu’était donc devenu le héros de « Chaos calme », ce roman qui avait fait chavirer nos cœurs, l’histoire de ce veuf qui passe ses journées devant l’école de sa fille plutôt que d’aller travailler ? L’auteur de ce texte formidable, Sandro Veronesi, a eu pitié de nous, pauvres lecteurs. Et voilà que paraît « Terres rares », la suite de l’histoire, en tous les cas la suite du destin de Pietro. Entendez que vous n’êtes pas obligé d’avoir lu le livre précédent pour vous précipiter sur celui-ci.

On avait peur d’être déçu, de ne plus retrouver cet humour, cette émotion, cette douce cruauté qui font de Sandro Veronesi l’un écrivains italiens contemporains les plus populaires. Dès les premières pages, le soulagement nous gagne : Pietro est resté le même. Aussi sarcastique, maladroit, imprévisible, imparfait qu’auparavant. Et si drôle !

Pietro, l’honnête homme, le plus civilisé des Italiens, se retrouve, en deux jours, acculé. Un chaos pas calme du tout. Les catastrophes s’accumulent. Sa fille Claudia, 18 ans, fugue chez sa tante et ne veut plus lui parler pour une raison qu’il ignore. Sur la route, il se fait arrêter et retirer son permis de conduire. Il se dispute avec sa maîtresse et, comble de l’épouvante, lève la main sur elle. La police vient perquisitionner son bureau car son associé et ami est, en vérité, un escroc. Pietro en perdrait la tête si son désespoir ne se transformait pas en affolement drolatique, en questionnement incessant sur cette société qui rend fou, sur ce qu’il est, ce qu’il fut, ce qu’il devrait être.

Pour couronner le tout, certaines scènes sont d’anthologie. On pense à cet épisode quelque peu scatologique que Pietro nous raconte. Ou comment un jeune homme dépressif rencontre une jolie fille qu’il ne pourra séduire. Que celui ou celle qui n’est pas pris d’hilarité en lisant ce chapitre nous jette la première pierre. On pense aussi au discours de la jeune Claudia sur le deuil, sur l’absence, sur tout ce que n’a pas vu, pas compris Pietro. Ce sont plutôt les larmes, alors, qui nous viennent.

Vous l’avez deviné, « Terres rares » nous a emballés. Au point de ralentir sa lecture pour ne pas la finir trop vite. Pour tous les chanceux qui ne connaissent pas encore Pietro Paladini, faites donc sa connaissance. Promis, vous ne le regretterez pas.

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