Fatal dimanche
Nicci FRENCH

Pocket
avril 2018
456 p.  7,95 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Bouquet final pour Nicci French

De « Lundi mélancolie (sous-titré « Le jour où les enfants disparaissent ») à « Fatal Dimanche » (« Tout s’arrête »), la boucle Frieda Klein se boucle. Six ans après avoir créé le personnage, Nicci French – alias le couple Nicci Gerrard et Sean French – nous invite à dire adieu à cette psychothérapeuthe qui s’attire les ennuis comme le Tower Bridge la foudre. Avec les six premiers volets, on s’est attaché à cette quadra aussi taciturne qu’observatrice, bouée de secours d’une bande d’amis à la dérive et phare dans la nuit des enquêteurs encalminés. On a appris à lui passer ses lubies, ses longues marches solitaires dans la nuit londonienne, son refus des compromis inutiles, sa franchise blessante jusque pour ses proches.

Avec elle, on ne s’est jamais ennuyé. Dans sa partition à quatre mains, chacun dans son bureau, lui dans sa cabane de jardin et elle sous leurs combles, le couple de romanciers britannique s’est toujours imposé un tempo élevé. On ignore comment ils mêlent leurs idées et leurs écritures, comment ils se défient, se critiquent et se corrigent, mais on devine que, pour cette septième et ultime aventure, ils ont fait le plein de stimulation. Il s’agissait de clore en beauté une sorte de défi d’écriture mais aussi, de manière plus personnelle, de refermer un chapitre de leur vie d’auteurs. Ne nous avaient-ils pas avoué, au printemps 2012, avoir imaginé cette créature littéraire pour compenser le vide laissé dans leur foyer par l’envol de leurs trois filles ?

Le menu de ce dimanche fatal et final n’est donc pas seulement copieux, il est aussi très relevé. Comme si, dans une surenchère de défis et de danger, le duo d’auteurs avait cherché une intrigue rassemblant toutes les précédentes. Frieda doit déjouer les plans du tueur qui, à chaque épisode, l’épie et la nargue sans jamais apparaître. Elle doit aussi démasquer un imitateur qui, dans les pas du premier, rôde et la menace. Elle doit sauver sa peau, et pour cela convaincre une jeune inspectrice plus raide que la justice, mais aussi protéger et rassurer les siens, couver cet assemblage de paumés qui remplace la famille qu’elle n’a pu fonder.

A plusieurs reprises, on manque d’y perdre le fil, et surtout d’y perdre Frieda. Il faut à chaque fois se remettre en tête l’axiome de base : elle attire ceux qui la haïssent et fuit ceux qui l’admirent. Passé ces quelques soubresauts, Nicci et Sean redonnent à la psy sa marge d’initiative et la machine à suspense repart, bien huilée. Jusqu’à une fin recentrée sur – oserait-on dire – le « moi profond » de leur héroïne. Et cette ultime phrase qu’elle prononce, trois mots à peine, qui continue de résonner une fois le livre refermé, laissant le lecteur comme interdit…

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