Une saison de nuits
Joan Didion

Traduit de l'anglais par Philippe Garnier
Le Livre de Poche
mars 2014
360 p.  6,90 €
 
 
 
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Run River

Nous sommes en 1959, dans l’ouest américain, sur l’exploitation familiale de houblon des McClellan. Everett, qui s’occupe aujourd’hui du Ranch est le descendant d’une dynastie de pionniers californiens. La Californie, Eldorado des américains depuis la ruée vers l’or. Le lieu de tous les rêves, de toutes les possibilités. Mais les années soixante se profilent et le visage de l’Amérique change, une mutation s’opère. S’amorce une nouvelle ère. Se dessine un nouveau monde.
Un coup de feu dans la nuit, déchirant et violent ouvre ce premier roman de Joan Didion (paru en 1963, traduit en France pour la première fois). Une détonation qui signe justement le déclin. L’effondrement d’une époque et celui d’un couple. Un parallèle intéressant entre l’intime et la société. Et au milieu coule une rivière… (le titre original est Run River).
Une femme – Lily – court jusqu’à la rivière. Ses talons claquent sur le ponton. Au bout de sa course, un homme ; son mari Everett est là, un calibre 38 dans la main. Sur le sol, un homme est allongé, sans vie. Drame passionnel, drame personnel.
Pour comprendre l’origine de ce meurtre et du mal-être de McClellan, Joan Didion nous fait remonter le temps. Nous voilà en 1938, Lily et Everett se rencontrent, s’aiment, se marient, ont des enfants, lui part à la guerre, elle reste, s’ennuie… Lily est une femme mélancolique, elle ne semble pas trouver sa place dans cette famille auprès d’un beau-père nostalgique et d’une belle-soeur naïve. Quand Everett rentre, quelque chose s’est cassée entre eux. Hypocrisie, mensonges, désillusions, mort, tromperies, l’incendie du four à houblons, la perte…
Le roman se clôt par un second coup de feu.
Un livre étonnant dans sa construction, avec un long flashback encadré par le présent. Un présent lourd marqué par la violence des sentiments et la colère d’assister à la destruction d’un empire. Et cette rivière tellement symbolique qui traverse de part en part le roman, insidieuse héroïne : nécessaire à la culture du houblon, berceau des amours de Lily et Everett, lieu mortel (noyade, suicide, meurtre). La rivière, celle par qui tout commence et tout finit.
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