Le réseau fantôme
Oliver Harris

traduit de l'anglais par Jean Esch
Seuil
seuil/policier
novembre 2015
421 p.  21,90 €
ebook avec DRM 15,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

La fin justifie les moyens!

Dans « Sur le fil du rasoir », l’inspecteur Nick Belsey butait sur un cadavre en émergeant d’une nuit de cuite dans un parc londonien. Il lui faisait les poches et les ennuis commençaient. Dans « Le réseau fantôme », dérangé par un chauffard en pleine pause vodka, garé dans une rue tranquille, il le poursuit jusqu’à un abri souterrain et le perd. Les ennuis arrivent quand il ramène dans ce tunnel une fille qu’il veut épater : elle se fait enlever sous son nez…

Savoir soigner à ce point ses attaques, c’est rare. Et comme les dieux du roman policier se sont penchés tôt sur le berceau d’Oliver Harris, ce trentenaire diplômé en littérature shakespearienne a des talents en pagaille. Ici, le kidnapping est un prétexte pour explorer un Londres souterrain qui le fascine. Un réseau de métro alternatif creusé cent mètres plus profond que l’officiel. Des centraux téléphoniques de secours montés en secret pendant la guerre froide. Des kilomètres de tunnels « stratégiques » dont les plans sont classés confidentiel défense.

De l’art de décaler un sujet pour le rendre appétissant. L’auteur tire de cette plongée un suspense impeccable. Il esquisse au passage une thèse de politique-fiction pas si folle : et si le gouvernement britannique avait, dans les années 80, en cachette de ses sujets, tout organisé pour s’enterrer en cas de conflit nucléaire ? Le vrai et le faux se mêlent si habilement que l’on file vérifier si chaque bunker en trompe-l’oeil et chaque building à double fond existe vraiment. Et comme c’est le cas…

Par-dessus le marché, ce romancier imaginatif, et qui sait prendre de la hauteur, excelle à triturer les codes du polar. Dans son précédent roman, Nick Belsey ne faisait que brouiller les pistes à son profit, quitte à s’asseoir sur la vérité. Ici, dans les zones grises du secret d’Etat où la loi ne pèse pas bien lourd, ce flic marginal et un peu voyou songe d’abord à sauver sa peau et celle de la disparue. Une fin qui justifie tous les moyens. Il ment comme il respire, s’asseoit sur les procédures, se gave d’amphétamines et fait craquer sa chef. Autant d’écarts qui le rendent irrésistiblement sympathique et donnent envie de le retrouver au plus vite.

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