Grâce à cette publication inédite en France, on découvre un écrivain britannique talentueux et prolifique, John Buchan (1875-1940), homme politique, gouverneur général du Canada et éditeur. Le héros de « Ceux de Midwinter » (1923), roman d’aventures historique, est un D’Artagnan écossais engagé pour la reconquête du trône anglais par Charles Stuart, évincé au profit de Georges 1er, prince de Hanovre. A l’automne 1745, Alastair Maclean, agent du prétendant à la couronne, parcourt le pays afin de rassembler les nobles d’Angleterre et de les inciter à combattre aux côtés des Highlanders d’Ecosse et des troupes françaises de Louis XV en soutien à la dynastie Stuart. C’est un voyage solitaire périlleux loin des grand-routes, au cœur des landes sauvages, des forêts et des marais brumeux. Au détour d’une aventure, Maclean rencontre une étrange tribu d’hommes dépouillés de tout, vivant en marge de la société, sortes de descendants de Robin Hood, dont le chef se nomme Midwinter. Ce dernier se trouvera opportunément sur le chemin du jeune officier tout au long de sa mission ; en effet, intrigues, trahisons, espionnage, les dangers sont nombreux et les idéaux d’Alastair Maclean mis à rude épreuve. La tiédeur de la noblesse confortablement installée dans ses privilèges est une première désillusion, tandis que le peuple apeuré vilipende les bandits écossais d’arrière-garde qui sèment la terreur dans les villages. A la fois plein de fougue et de nostalgie, notre héros, dans ce roman initiatique, confronte ses valeurs et ses ambitions de gentilhomme à un pays en proie au doute, lui-même déchiré entre la loyauté envers son roi et l’amour pour une belle lady. L’amitié avec Samuel Johnson, le célèbre lexicographe encore inconnu et pauvre enrichira durablement son expérience humaine. John Buchan décrit avec talent et réalisme les paysages de landes et de vallées, les odeurs de la nature, le climat rude, les auberges fumantes et leurs repas giboyeux. Avec finesse, il montre la fin d’une société traditionnelle dont l’honneur n’est plus la valeur fondamentale et qui glisse vers des intérêts plus bourgeois d’ordre et de prospérité. Personnages hauts en couleur, romanesque à souhait, voici une lecture aussi captivante qu’enthousiasmante.
