Cherry
Nico Walker

Les Arènes
avril 2019
432 p.  20 €
ebook avec DRM 14,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
nuit blanche

Born in the USA

L’histoire d’un jeune américain, passé par l’Irak en tant que médecin de guerre, transpercé par la drogue, aujourd’hui emprisonné pour braquage, depuis 10 ans déjà, et jusqu’en 2020, au moins. L’histoire, donc, de Nicholas Walker, dit « Nico », excellemment traduite par Nicolas Richard (dit « Nico »?) et judicieusement édité par Aurélien Masson pour sa déjà remarquée collection Equinox aux Arènes.
C’est cela, Cherry, mais ce n’est pas que cela.
C’est aussi, c’est surtout une dose de littérature à grand coup de rangers dans les portes, la gueule aussi parfois, où ça vomit plus que de raison, ça deale, ça consomme, ça foire, ça baise, ça se branle aussi, 400 pages de lucidité serrée comme un poing, accouchées depuis sa prison par un journaliste qui fleura la perle.
Car ils ‘agit bien ici de grand numéro, d’un de ces rares livres qui transperce, qui tacle, qui n’est jamais au dessus de ce qu’il raconte, juste à hauteur, à juste hauteur, au niveau, à égale distance de vulgarité, d’humour ravagé, d’exacerbations en tout genre.
Cherry n’est pas juste le roman d’un taulard, c’est le roman d’un pauvre con, un peu, d’une sorte de tête brûlée, d’un jeune gars qui s’engage dans l’armée parce qu’après tout « que faire d’autre ». Revenu de l’Irak, une de ces guerres pour rien dont raffole les Etats Unis, le jeune homme devenu « héros » (version polie de vétéran) se réfugie dans la drogue à n’en plus finir. Qui dit besoin de drogue dit nécessité d’argent, d’où braquages au pied levé.
Au final, la mort ou la prison. Ce sera la prison, tant mieux pour nous :
« Quand l’automne est arrivé, on voyait bien qu’on était un peu cabossés. Dans cet état, aucun d’entre nous n’aurait fait illusion dans la bonne société; ceux d’entre nous qui enfonçaient des portes à coup de pied, mettaient en pièces des maisons et tiraient sur les gens étaient psychotiques.(…) Ça n’avait plus rien d’intéressant. Il n’y avait rien. Nous avions perdu notre temps. Nous avions perdu. Les gens n’arrêtaient pas de mourrir : tout seuls, par deux, pas de héros, pas de batailles. Rien. Nous étions juste de la piétaille, des épouvantails glorifiés ; là uniquement pour avoir l’ai occupés, à arpenter la route dans un sens et dans l’autre, pour un prix exorbitant, cons comme des balais. »
Il y a dans Cherry à la fois parmi les meilleures pages sur ces guerres insensées (dont on ne voit jamais les corps) et d’une page l’autre, les plus belles fulgurances sur ces jeunesses sous opiacés qui commencent à sérieusement hanter l’Amérique.
Un roman spectaculaire de derrière les barreaux, par un jeune homme en capilotade, sinon en charpie, qui pourrait bien, mine de rien, finir par réussir sa vie : « Cherry » devrait prochainement se voir adapté au cinéma. Cerise sur le gâteau.

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