Dites aux loups que je suis chez moi
Carol RIFKA BRUNT

10 X 18
litt etrangere
juin 2016
504 p.  8,80 €
 
 
 
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coup de coeur

Ce roman nous ramène au milieu des années 80, au moment de l’éclatement de l’épidémie du sida. Ceux qui avaient la vingtaine comme moi à cette époque se souviendront très bien de la façon plus qu’honteuse dont cette maladie était présentée. L’héroïne de ce roman est June, une jeune adolescente, un peu boulotte, qui se sent décalée par rapport à sa soeur aînée Greta, 16 ans, qu’elle trouve plus fine, plus jolie, plus intelligente. Ses parents sont comptables et particulièrement pris par leur travail. June n’est pas asociale mais n’a apparemment pas d’amis proches de son âge. Elle voue une très grande admiration à Finn, son oncle maternel, artiste peintre renommé avec lequel elle passe de longues après-midi culturelles. Finn, homosexuel, est malade du sida. Sentant sa fin proche, il décide de réaliser un portrait de ses deux nièces ensemble. Quelques semaines plus tard, toute la famille assiste à son enterrement. June aperçoit un homme qui se tient en retrait. La colère manifestée par sa mère lui fera comprendre qu’il s’agit du petit ami de son oncle, celui qui a transmis à Finn la terrible maladie. June sera contactée par cet homme, Toby. Elle se liera en secret d’amitié avec lui et découvrira au fur et à mesure qui était véritablement son oncle : « – Finn avait l’air de se ficher du fait qu’il allait bientôt mourir, ai-je dit. Et c’était la vérité, Finn était d’un calme olympien jusqu’au bout, jusqu’à cette dernière fois où je l’ai vu. – Eh oui.C’est ça le secret. Si l’on s’assure d’être toujours exactement celui qu’on veut être, si l’on fait en sorte de ne connaître que les personnes les plus formidables, alors peu importe de mourir demain. » Si au début de cette amitié, June est surtout guidée par l’envie de retrouver un peu de son oncle adoré à travers Toby, les mois passant, elle va prendre conscience que Toby la guide à travers ses propres sentiments (notamment l’amour caché qu’elle ressentait pour Finn et qu’elle vivait d’une manière honteuse). « Mais si on se retrouvait à éprouver la mauvaise sorte d’amour ? Si par accident, on finissait par tomber amoureux de quelqu’un dont il serait si dégoûtant d’être amoureux qu’on ne pourrait en parler à personne au monde ? (…) Et si cet être était votre oncle et que, chaque jour, vous portiez cette chose dégoûtante avec vous en pensant qu’au moins personne n’était au courant, que tant que personne ne le saurait tout irait bien ? (…)Toby avait posé sa joue contre le haut de ma tête et ses larmes coulaient le long de mon front et de mon visage, dégoulinant au-dessus de mes yeux…. Glissant sur ma joue et mes lèvres. Je ne savais pas si l’on pouvait attraper le sida par les larmes, mais je m’en fichais. Ce genre de choses ne me faisait plus peur. » Toby lui révèle les liens fraternels profonds qui ont unis jusqu’au début de l’âge adulte Finn et Danni, la mère de June et comment ces liens se sont délités en raison du comportement de Danni, comment celle-ci l’a accusé à tort d’avoir transmis le sida à Finn. Avec une grande bienveillance et sans jamais rien demander pour lui-même Toby va faire grandir June. Ce qui aura des retentissements sur la vie de sa famille, mais je n’en dirai pas plus car il vous faut découvrir ce roman. Et comprendre à la page 459 l’origine du titre. Je vous garantis que vous allez passer un excellent moment de lecture.

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