Femme Interdite
Ali Al-Muqri

traduit de l'arabe par Khaled Osman
LIANA LEVI
décembre 2099
208 p.  18 €
ebook avec DRM 14,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

La femme interdite

En ces temps d’éclairages sur la journée du 8 mars (journée des femmes, de leurs droits et luttes…), plonger dans Femme Interdite d’Ali Al-Muqri est plus qu’interpellant !

Ce texte parfois dérangeant donne la parole à une jeune femme yéménite étouffée par une société des plus hypocrites. Cadette d’une famille modeste, la narratrice est une jeune fille qui peine à trouver sa place dans un milieu traditionnel…du moins en apparence. Sa sœur Loula utilise son corps pour sortir de sa condition, en cachette de leurs parents qui empochent l’argent qu’elle leur donne sans trop s’interroger. Le frère, Raqib, est plutôt marxiste au début de ce roman, étudiant la philosophie et…dévergondé. Proche de sa sœur, qui lui envie cette vie universitaire à laquelle elle-même ne peut prétendre. Un frère qui se radicalisera peu à peu après son mariage, donnant paradoxalement à notre héroïne un chemin à suivre pour tenter de vivre autrement.

Comment exister dans ce non choix-là ? Dans une société qui refuse à ses jeunes filles le droit d’être libres, de pouvoir exprimer leurs envies, leurs désirs, la narratrice s’adapte. Comme tant d’autres, elle verra des films en cachette pour en apprendre plus sur le sexe et les hommes. Deviendra une femme coincée entre soif d’amour et romantisme et envie de vivre pleinement sa sexualité.

En mûrissant, l’héroïne d’Al-Muqri est tiraillée entre l’envie de prendre la vie à bras le corps, comme sa sœur -la dimension de péché en moins- et la soif d’absolu que semble lui offrir la religion telle qu’elle est proposée par son frère devenu prédicateur. Elle « choisira » de partir faire le djihad en Afghanistan, une expérience qui virera au grotesque.

Ali Al-Muqri, auteur et essayiste yéménite (« Le Beau Juif », en 2011) décrit avec intensité une femme étouffée par les traditions et la religion, dans un pays qui applique la charia. Une oppression constante, qui oblige à bien des hypocrisies. A de nombreux drames aussi. « Je m’éloigne. Je m’écarte de moi-même et de l’endroit où j’ai vécu (…). Je suis libre…. je suis une femme-défendue (…). Je suis devenue une femme-défendue dépourvue de son essence…Une femme interdite (…) ». Ce monologue tenu par la narratrice vous restera longtemps en tête.

partagez cette critique
partage par email