Je te protégerai
Peter May

Editions du Rouergue
rouergue litterature
mai 2018
416 p.  23 €
ebook avec DRM 16,99 €
 
 
 
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Je te protégerai

Quel bonheur de retrouver la plume de Peter May, un auteur que j’affectionne beaucoup. Sa magnifique « Trilogie écossaise » est sans conteste un de mes plus beaux souvenirs de lecture.

A découvrir de toute urgence si vous ne connaissez pas.

Peter May d’origine écossaise nous décrit à merveille les nouvelles îles Hébrides (Lewis, Harris) , ces îles qui sont une fois encore un personnage central du roman.

L’auteur décrit la nature de façon magnifique; les tourbières, la couleur changeante de la Lande, la lumière du ciel, la mer et les éléments déchaînés, c’est un vrai régal.

Il nous parle du mode de vie des îliens, de la culture gaélique, de l’artisanat local. Partons à la découverte du Harris Tweed.

Niamh (prononcez Nive) Mac Farlane a créé avec son mari Ruairidh (Rory c’est plus simple) une fabrique de Ranish Tweed, une entreprise de textile. Ils sont à Paris pour défendre leur collection lors d’un salon.

Un étrange mail signé « d’un ami qui vous veut du bien » annonce à Niamh que son mari la trompe avec Irina Vetrov, une célèbre créatrice de mode. Elle est inquiète pour son couple, surprend Ruairidh partant en voiture avec Irina. Un peu plus loin , place de la République, la voiture explose.

Le lieutenant Sylvie Braque poursuit l’enquête, Niamh est la première suspecte..

Retour aux sources, les îles Hébrides, son enfance, la rencontre avec son futur mari, la création et les multiples difficultés de leur entreprisse avant de connaître le succès.

De retour sur l’île elle se sentira observée, elle va revivre ses souvenirs et ses drames personnels. Le lieutenant Sylvie Braque viendra également sur l’île, elle est perdue dans ses sentiments, dans ses choix, sa famille ou son travail.

Avec beaucoup d’habilité, Peter May nous emmène dans un roman noir, un thriller efficace même si le final est un rien prévisible. L’écriture est très belle, la description des émotions est parfaite, il nous parle de la perte, du deuil mais surtout et avant tout de ces îles magnifiques qui m’ont procuré un réel plaisir de lecture. On ressent presque la pluie et le vent qui souffle tant c’est réaliste et bien décrit.

Ma note : 9/10

Les jolies phrases

Le temps ne passait jamais plus lentement que lorsqu’on le surveillait.

Les gens comptent davantage que le boulot. Le coeur est plus important que la paie.

Si on pouvait retourner en arrière et changer une seule chose dans sa vie, cela pourrait modifier notre avenir, mais pas nécessairement la chose qu’on voudrait voir changer. On peut seulement regretter les décisions prises en pleine connaissance de leurs conséquences. Et Dieu sait s’il y en a.

La mort n’est jamais juste. Pas plus que la vie. Nous vivons avec la certitude qu’elle s’achèvera. Mais sans savoir où ni comment.

Lorsqu’ils atteignirent finalement le sommet, un spectacle grandiose s’offrit à eux. Un croissant d’or pâle s’allongeait vers le sud ; la mer d’un turquoise étincelant, ourlée d’écume blanche sur le sable lisse et brillant, prenait vers le large une couleur d’un bleu marine intense au fur et à mesure qu’elle gagnait de la profondeur.

-Je ne peux pas imaginer un endroit plus beau pour passer l’éternité.
– Personnellement, madame, je préfère le regarder du point de vue des vivants plutôt que de celui des morts.

Peur-être, quand on aime quelqu’un, n’a-t-on pas besoin de courage. On fait simplement ce que notre coeur exige, même si notre tête nous traite de fou.

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Bon, allez, en ce début d’été, je vous emmène dans l’archipel des Hébrides et plus précisément sur l’île de Lewis et Harris (nord-ouest de l’Écosse) : un vol Paris – Stornoway via Manchester et Inverness – pas de direct, vous croyez quoi, vous ? Et n’allez pas oublier la polaire, l’épais coupe-vent et les bonnes chaussures de marche, voire les bottes. Prêt ? C’est parti ! (J’ai évidemment réservé au Crown Hotel de Stornoway – pour l’arrivée, car après : camping !)
Même si le roman commence à Paris – et vous découvrirez tout seul pourquoi – c’est essentiellement sur cette île du bout du monde que nous promène Peter May. Et quelle balade ! Cet auteur a vraiment le don de nous immerger (à prendre au pied de la lettre!) dans un lieu, une atmosphère, des traditions et, il faut bien le dire, c’est ce que j’ai préféré dans ce roman ! En effet, ce Peter May a toute une palette de mots pour décrire les mille nuances de la mer tourmentée, les vents formidables qui décoiffent landes, bruyères et tourbières, les pluies insensées et les tempêtes extraordinaires, les multiples reflets du soleil sur les nuages : tout est lumière, couleur, souffle, tout est changement, transfiguration, métamorphose. Le grand soleil peut disparaître en un clin d’oeil et laisser place à des vents violents, des vagues rageuses et une terre boueuse sur laquelle il devient impossible d’avancer.
La sensation de vivre semble être multipliée à l’infini sur ces îles, tellement la nature est là dans toute sa puissance et sa force et l’on se sent petit, très petit même, face à une telle fureur !
Et Peter May place tous nos sens en alerte : on sent l’odeur de la mer et du vent ! Je me suis régalée de ces éléments en furie d’autant que je n’avais pas à les vivre, vautrée que j’étais dans mon lit ou ma chaise longue. Voilà à quoi sert la littérature : nous transporter et c’est certain, je l’ai été avec ce texte !
Après les paysages, les traditions et les coutumes qui font l’identité d’un pays : vous allez être plongé dans l’univers du tissage et de la fabrication des textiles, le Harris Tweed ou le Ranish Tweed, les anciennes fabriques de Shawbost et de Carloway, les vieux métiers à tisser comme le Hattersley remplacé par le Griffith double largeur, sans parler des tisserands et de leurs gestes ancestraux. Écoutez donc : « Le tissu était doux, somptueux, presque sensuel sous mes doigts. Mais c’étaient ses couleurs qui me fascinaient le plus. – C’est magnifique. Ça me fait penser à la découpe de la tourbe sur Pentland Road par un jour ensoleillé. Toutes ces teintes différentes. Les premières nouvelles pousses au milieu des herbes de l’hiver. Vert et rouge. Le brun des racines de bruyère, le bleu du ciel qui se reflète dans tous ces petits trous d’eau. » Pure poésie, non ? L’auteur précise d’ailleurs, en exergue, que « Le Harris Tweed est le seul tissu au monde à être décrit par une loi du Parlement. Cette loi de 1933 le définit ainsi : « Tissé localement à la main par les habitants des Hébrides extérieures, fini sur le sol des Hébrides extérieures, fait de pure laine vierge teinte sur le sol des Hébrides extérieures. » C’est clair, non ? Une espèce de super Label Rouge quoi !
Plus anecdotique par rapport au sujet principal de l’histoire mais néanmoins très amusante , j’ai beaucoup aimé l’évocation de la tradition du vol de portail le soir d’Halloween! Un truc comme ça, ça ne s’invente pas !
Et puis, il y a la langue : d’abord, dès le début, une page sur « la prononciation des mots gaéliques » : exemple « Amhuinnsuidhe » se prononce « av-anne-soué ». Répétez après moi ! Facile, non ? Allez, pas de frayeur, je suis tellement douée pour les langues que j’ai très vite abandonné et me suis fait un petit gaélique perso et tout s’est très très bien passé ! Ah, cette langue, elle fait vraiment partie du dépaysement : la mamaidh, les midges (beurk), le bothag, le machair, les balanisrachs, la tairsgear et n’oublions pas les noms propres : les Macfarlane, Ruairidh (personnage principal) qu’il faut prononcer Rou-are-i.
Découvrir cet univers m’a ravie, really ! Un vrai voyage dans l’espace et le temps que l’on retrouve immanquablement dans les romans de Peter May…
Maintenant, l’intrigue : bien sûr, il s’agit d’un roman policier dans la mesure où il y a une enquête mais on sent qu’au fond là n’est peut-être pas l’essentiel. Bon, deux mots, pas plus : Ruairidh et sa compagne Niamh, fondateurs de l’entreprise de tissu Ranish Tweed, sont venus à Paris pour participer au salon Première Vision. Mais Niamh soupçonne son mari d’avoir une liaison avec la créatrice russe, Irina Vetrov. C’est d’ailleurs une information qu’elle vient de recevoir via un mail anonyme. Alors, lorsque son mari lui annonce qu’il se rend à une réunion chez Yves Saint Laurent, elle a des doutes, le suit et tente de le rattraper… sans savoir que, dans quelques minutes, son destin va prendre un chemin imprévu et totalement basculer. STOP, pas plus – j’aurais peur que vous m’étrangliez! Comme je vous le disais, si je n’ai pas lâché mon bouquin avant de savoir le nom de l’assassin, preuve que le suspense est là et que ça marche, au fond, l’intrigue me semble être le prétexte à la découverte des hommes qui habitent cette terre, des paysages qui sont les leurs, des coutumes qu’ils respectent encore : c’est toute une époque, finalement, qui nous est racontée à travers l’histoire de Niamh et de Ruairidh, personnages dont on découvre petit à petit le passé et la vie sur cette île où chacun garde ses secrets et ses rancoeurs.
C’est certain, je n’oublierai jamais la maison de Ruairidh et et Niamh et les vues imprenables qu’elle offre sur l’océan les soirs de tempête, je la garderai longtemps au fond de moi comme un petit refuge du bout du monde…
Si vous êtes prêt pour l’embarquement, c’est parti ! Vous allez voir, ça va décoiffer !

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