Le fils
Philipp MEYER

Le Livre de Poche
litterature doc
mars 2016
792 p.  9,70 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

Un sentiment de conquête et de liberté.

A la découverte de l’histoire de Texas de 1836 à nos jours. Philipp Meyer nous emmène dans une belle épopée, une famille à travers trois générations. Eli Mac Cullough dit le colonel est l’ancêtre, celui dont l’histoire m’a le plus captivée. Eli a 11 ans lorsqu’il est enlevé par une tribu de Comanches. Il voit sa famille périr tragiquement et violemment sous ses yeux. Durant trois ans, il vivra avec Toshaway et sa tribu. Il deviendra l’un d’eux et découvrira le sentiment de liberté. Par moment , j’ai cru que j’allais devenir spécialiste des Comanches. Leur mode de vie, l’art de tanner les peaux, de faire des arcs et flèches, de chasser …tout est présenté, c’est super bien, voire trop documenté , j’avais l’impression de lire un manuel d’anthropologie. Trois ans plus tard, il reviendra à la vie civile et devra s’intégrer dans la société. Ce sera difficile, il intégrera alors l’autre camp celui des rangers et fondera peu à peu sa dynastie et sa fortune à la tête d’un ranch et la découverte de l’or noir. Il s’adresse à nous à la première personne. Son fils, Peter nous parle par le biais de son journal intime. Il ne supporte pas l’autorité de son père et ne suivra pas sa voie. On retrace avec lui la révolution mexicaine. Ce sont surtout la terre et les rapports humains qui sont mis en avant durant cette révolte. Il fera un choix qui bouleversera sa vie. Arrive ensuite Jeanne-Anne, l’arrière-petite-fille d’Eli qui nous est racontée par quelqu’un d’extérieur. Un caractère bien trempé, rebelle, plus proche de l’esprit d’Eli. Elle est l’héritière à la tête d’un empire mais à quel prix ? C’est le personnage qui m’a le moins passionné dans la première partie du récit. C’est donc l’histoire du Texas qui nous est retracée ; de la conquête de l’ouest, de la colonisation des terres indiennes par les blancs, l’extinction des indiens, de l’implantation des plantations, des ranchs, la guerre de sécession et le révolution mexicaine en passant par la découverte de l’or noir, son développement, l’évolution des marchés pétroliers, l’internalisation, l’obligation de se diversifier… Une multitude de sujets qui reflète l’évolution des mentalités de la société civile texane. Aussi le regard de l’autre sur la différence et le racisme vis-à-vis des mexicains et noirs (sur toile de guerre de sécession). Une jolie saga. J’ai eu du mal au départ mais je ne suis pas une référence en littérature américaine, je sais que je dois persévérer car c’est lent, trop lent pour moi mais je suis heureuse de m’être accrochée car la lecture en vaut vraiment la peine. Je regrette juste d’avoir eu du mal au départ malgré l’arbre généalogique à situer les personnages dans le temps. La construction du récit passe tour à tour par chaque personnage, d’une époque à l’autre, de chapitre en chapitre. J’ai même eu envie un moment de lire l’histoire de chaque personnage de façon séparée. Mais à partir d’un bon tiers, les pièces du puzzle s’assemblent. La nature est les paysages sont juste magnifiques. L’écriture est fluide, le récit très intéressant. Sans être un coup de coeur j’ai passé un bon moment. Ma note : 7/10 Les jolies phrases Le pays était alors aussi riche de vie qu’il est pourri de gens aujourd’hui. Le seul problème, c’était de garder son scalp. …qu’elle avait compris que c’était elle qui avait raison, que quand les gens s’habituent à avoir de l’argent pour rien, à ne travailler que quand ça leur chante, ils en viennent à trouver le travail dégradant. Les gens pensaient qu’on devait à Henry Ford d’avoir introduit l’ère automobile. Faux. Avant la voiture, il y avait eu la charrette. Le début de l’ère automobile, c’était le gisement de Spindletop, complété par la tête de forge miraculeuse de Howard Hughes. Crée quelque chose à partir de rien. L’espérance de vie a doublé; sans pétrole, impossible d’aller à l’hôpital, de fabriquer des médicaments, d’acheminer de la nourriture jusqu’aux magasins, sans parler des tracteurs qui ne quitteraient même pas la grange. Elle puisait dans le sol quelque chose qui ne servait à rien et le ramenait à la surface, à la lumière, où il prenait du sens. C’était une forme de création. C’était toute sa vie. Le pétrole s’était mis à remonter – voir un puits se construire là où il n’y avait que le désert, voir couler l’or noir après un bon fracking, surtout quand tous les autres avaient renoncé : c’était ça, sa raison de vivre. Tirer quelque chose de rien. Créer. Elle aurait toujours le temps de s’occuper de sa famille. Papa flaire le changement comme un ivrogne un salon de thé. Un jeune puma abandonné en pleine nature deviendra un puma parfaitement normal. Mais un enfant qu’on abandonnerait pareillement deviendrait un sauvage méconnaissable, inapte à la vie en société. Ils croient (les blancs) que si tu ne vois pas ceux que tu voles ou que tu ne les connais pas ou qu’ils ne te ressemblent pas, alors ce n’est pas vraiment du vol. Les gens biens, il ne leur arrive pas toujours que des choses biens. Et toi aussi tu vas choisir. Ou bien ils t’aimeront mais ne te respecteront pas, ou bien ils te respecteront mais ne t’aimeront pas. Quand on voudrait ne pas voir le serpent, ils sont partout, et quand on en cherche un, ils sont introuvables. Un être humain, une vie – ça méritait à peine qu’on s’y arrête. Les Wisigoths avaient détruits les Romains avant d’être détruits par les Espagnols et les Portugais. Pas besoin de Hitler pour comprendre qu’on n’était pas dans une jolie petite histoire. Et pourtant, elle était là. A respirer, à penser à tout cela. Le sang qui coulait à travers les siècles pouvait bien remplir toutes les rivières et tous les océans, en dépit de l’immense boucherie, la vie demeurait. J’ai toujours trouvé intéressant que les enfants blancs adoptent si vite les moeurs indiennes alors que les petits indiens élevés par des familles blanches ne s’y font jamais. Mais si tu veux un avenir, même là-bas il te faudra de l’instruction, si pénible que cela te soit. Certes, on voulait toujours pour ses enfants une vie meilleure que la sienne. Mais à partir de quand le mieux devenait-il l’ennemi du bien ? Sans incertitude matérielle, les êtres humains s’autodétruiraient. Elle pensa à ses petits-enfants, à tous ceux qui suivraient.

Retrouvez Nathalie Vanhauwaert sur son blog.

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