Le lecteur à domicile
Fabio Morabito

Corti
Iberiques
mai 2019
223 p.  20 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

L’apprentissage de la lecture

Le roman de l’écrivain mexicain Fabio Morabito est un plaidoyer pour la lecture, sur fond de prosaïsme, de solitude et de mafia dans une ville proche de Mexico, Cuernavaca, où Eduardo Valverde, le héros, a écopé d’un travail d’intérêt général après avoir commis un délit. Par l’entremise du confesseur de sa sœur, il obtient de faire la lecture chez des personnes retraitées ou malades. Sa « clientèle » est composée des deux inquiétants frères Jiménez, qui l’accusent de ne pas prêter attention à ce qu’il lit, des Vigil, une famille de sourds dont les enfants entendent en réalité fort bien, de Margo Benitez, une ancienne soprano en fauteuil roulant dont il tombe amoureux, d’un vieux colonel qui s’endort après quelques pages, et d’un couple aisé, les Reséndiz, enthousiasmés à chaque séance par sa prestation vocale, bien qu’Eduardo ne comprenne jamais rien à ce qu’il lit. A presque trente-cinq ans, ce dernier vit chez son père atteint d’un cancer en phase terminale, il s’occupe du magasin de meubles familial mais s’interroge sur son existence ennuyeuse dans cette ville sans âme, entre son père mourant, la gérance du magasin racketté tous les mois par la mafia locale, et cette activité temporaire de lecteur qui lui apporte quelques ennuis… Un jour, il découvre par hasard un poème de la grande poétesse mexicaine Isabel Fraire (1934-2015), que son père connaît par cœur et qui va changer sa relation avec son auditoire. Porté par un élan nouveau, il troque Dostoïevski, Buzzati et Du Maurier contre la poésie d’Isabel Fraire, ce qui lui confère une aura singulière, dans le même temps qu’il recherche le dédicataire de son exemplaire de poèmes déniché dans une librairie d’occasion.

Eduardo découvre le sens des mots comme le sens de la vie, apprenant vraiment à lire et à comprendre les autres, lui qui évolue constamment dans « sa bulle ». L’auteur mêle ses personnages à des intrigues qui se recoupent, à des mystères, laissant leur part d’ombre aux protagonistes de cette histoire à l’atmosphère trouble et inquiétante. On y parle non seulement de littérature, mais aussi de l’incompréhension entre les êtres, des malentendus qui les éloignent, et des histoires qu’ils s’inventent pour pallier ces « mésententes ».

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