Le Volontaire
Salvatore Scibona

traduit de l'anglais par Eric Chédaille
Christian Bourgois
janvier 2020
448 p.  23 €
ebook avec DRM 13,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Un grand roman américain

Après « La fin » (2010) qui valut à Salvatore Scibona de nombreux prix, voici son deuxième roman non moins puissant sur l’Amérique et ses grands thèmes : la filiation, l’identité, Dieu, la guerre, l’argent. Avec un souffle romanesque exceptionnel, l’auteur raconte sur plusieurs décennies et continents le destin de trois générations d’hommes qui tentent de se trouver.

Celui qu’on appelle le Volontaire est Vollie Frade, alias Dwight Tilly, qui doit son surnom à son engagement dans la guerre du Vietnam pour laquelle il rempile deux fois. Issu d’une ferme pauvre de l’Iowa, grandi dans la solitude et le vide, Vollie choisit de s’abîmer dans le conflit, au milieu des bombardements et des massacres, persuadé que la vie n’est que néant et perte inexorable. Constitué prisonnier puis libéré, il est menacé d’une peine pour désertion s’il ne cède pas au chantage des services secrets américains qui lui confient une mission. A cet effet, il change d’identité et devient Dwight Tilly, salarié sans histoire domicilié à New York. Sa tâche inavouable accomplie, il disparaît au Nouveau-Mexique où, dans un camp de hippies déserté, il rencontre une femme et un enfant, Louisa et Elroy. Il fait un bout de chemin apaisé avec eux avant de tailler à nouveau la route lorsque son passé le rattrape.

Quelques trente ans plus tard, à l’aéroport allemand de Hambourg, un garçonnet letton est abandonné par son père. Il semble payer la note du tropisme des deux hommes qui l’ont précédé, Tilly et Elroy, attirés par la néantisation. Que signifie être un homme, un homme bien ? Peut-on se construire une identité en dépit du rejet ? On ne change pas de vie aussi facilement que l’on change de nom, mais le rachat est-il possible ? Ce roman possède une mélancolie et une aspiration à l’impossible grandeur, un humour et un lyrisme qui contrebalancent la tragédie sans la neutraliser. Il explore la notion américaine de réinvention de soi dans le pays de tous les possibles qui dissimule son cynisme sous des liasses de dollars, et que la désillusion attend au tournant.

 

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