Personne ne disparaît
Catherine Lacey

traduit de l'anglais par Myriam Anderson
Actes Sud Editions
romans, nouvell
février 2016
288 p.  22 €
ebook avec DRM 8,49 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Partir pour se retrouver

Un matin à New York, une jeune femme attend que son mari parte travailler pour quitter discrètement l’appartement conjugal. Et elle s’envole pour la Nouvelle Zélande. Là-bas, dans un coin perdu, vit un vieil écrivain. Elle l’a croisée un jour de signature, dans une librairie. Ils avaient été présentés. L’écrivain lui a dit qu’il pourrait la loger s’il lui prenait l’envie de faire le voyage. Alors elle y va.

On peut se demander ce qui conduit une jeune femme à quitter son mari. Elle-même se demande ce qui l’a poussée à se marier. Catherine Lacey signe ici un premier roman d’une construction remarquable. Alors que la narratrice se lance dans un road-movie un peu erratique, en autostop à travers des paysages à peu près déserts et infinis, des bribes de son passé lui reviennent en mémoire, à rebours. Une sœur adoptive disparue, une étrange famille, une enfance où déjà s’accumulent les non-dits. Il flotte sur ses digressions une culpabilité dont elle ne parvient pas à se défaire. Et une envie de divorcer, non pas tant de son mari, explique-t-elle, que de sa vie entière.

Peu à peu, se reconstitue donc une vie de femme qui semble passer son temps à côté d’elle-même, travaillant comme scénariste pour un soap-opera sans grand intérêt alors qu’une éditrice enthousiaste lui réclame un roman. Mais elle n’a pas envie de l’écrire. Que cache cette histoire ? Très vite, on est ému par cette jeune femme, un peu farfelue, qui se débat depuis toujours et qu’on devine encombrée d’une souffrance indicible.

Encore fallait-il que l’auteur soit capable de nous faire partager ses interrogations, car il n’est probablement pas simple pour un écrivain de mettre en scène le désarroi. Catherine Lacey y parvient grâce à une langue inventive, privée de lieux communs et d’expressions toutes faites mais pleine d’images fortes et justes. Car cette narratrice réfléchit, écoute, et chaque rencontre fortuite au cours de son périple la conduit à s’interroger et à se souvenir. Se révèle sous nos yeux un personnage complexe, qui évolue au cours du livre, avance au sens propre comme au figuré, et on s’émeut de ses hésitations, et des mots qu’elle ne dira pas, alors qu’elle téléphone à son mari depuis une cabine publique, qu’il est chez eux à New York et qu’elle ne sait comment lui expliquer pourquoi elle se retrouve ainsi au milieu de nulle part.

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 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Un premier roman troublant et émouvant.

Un matin, sans prévenir personne, Elyria quitte tout. Elle dit adieu à son quotidien New Yorkais confortable, son mari, son boulot. Destination la Nouvelle Zélande avec comme seul bagage un sac à dos et quelque dollars en poche.
Un départ sur un coup de tête avec l’idée d’être hébergée par un obscur écrivain rencontré lors d’une soirée mondaine.
Dès son arrivée s’engage un road movie en auto stop, à travers ce pays inconnu, malgré les conseils de prudence.
Au gré de ses rencontres et des imprévus, Elyria s’interroge, que souhaite-t-elle ?
Veut-elle disparaitre ? Veut-elle au contraire se découvrir ? Partie sans bagages mais avec des souvenirs envahissants.
 Des flashbacks sur sa vie à New York, sa relation difficile avec sa mère indifférente et maladroite, le suicide de sa soeur, son mariage avec un professeur d’université qui l’infantilisera.
Quelque soit la nature de la relation maternelle ou maritale, elle semble sans amour.
Une introspection douloureuse, une quête d’identité à la limite de la folie.
Un roman magistral sur la déception d’être soi.

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