Rebecca
Daphné Du Maurier

ALBIN MICHEL
février 2015
534 p.  25 €
 
 
 
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coup de coeur

rebecca

Lire notre interview de Anouk Neuhoff, la traductrice de cette nouvelle version de Rebecca. C’est ici.

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Un chef d’oeuvre remis en valeur et en lumière

Cette nouvelle traduction, c’était surtout un prétexte pour me replonger dans ce roman lu il y a déjà de nombreuses années. Que dis-je, lu ? Dévoré, oui. Pourtant, je relis rarement, très rarement… Il y a tant de nouvelles parutions chaque jour. Ce qui m’a décidée, c’est l’envie de redécouvrir le texte, de m’intéresser à la construction et à l’écriture plus qu’à l’histoire et puis aussi de mesurer à quel point les images naissant de ma lecture pouvaient être influencées par ce que j’en savais déjà et notamment par le fameux film d’Alfred Hitchcock.

En fait, je pense que j’ai beaucoup plus apprécié cette seconde fois… La traduction y est sans doute pour quelque chose même si je n’ai pas gardé mon exemplaire de l’époque et suis donc incapable de comparer les deux versions. Mais la narration est fluide, le langage particulièrement évocateur et, bien que connaissant l’histoire (La jeune épouse de Maxime de Winter confrontée au souvenir de Rebecca, sa première femme décédée tragiquement et regrettée par tout son entourage, en apparence…), je me suis laissée ferrer une nouvelle fois, prise par la façon dont Daphné du Maurier fait monter la sauce (l’apparition progressive de Rebecca ou plutôt de son souvenir, signature par-ci, on-dit par-là est orchestrée de façon brillante), impressionnée par la maîtrise de l’ensemble. De ma première lecture, je garde le souvenir d’une atmosphère inquiétante, du mystère autour de Rebecca et surtout de la terreur suscitée par la terrible Mme Danvers. Du film, j’ai malheureusement gardé en tête le visage de l’héroïne (dont le prénom n’apparaît jamais dans l’histoire dont elle est la narratrice) et là aussi une atmosphère inquiétante. Cette fois-ci, mon intérêt s’est beaucoup focalisé sur la façon dont l’auteure campe le décor, sur le personnage central et sa transformation au fil des pages (qui permet aussi d’illustrer une réflexion puissante sur le couple), et sur la façon dont elle fait de Manderley un personnage à part entière.

L’héroïne m’est apparue beaucoup moins nunuche que dans mon souvenir, certes manquant de confiance en elle et désemparée face à un monde qu’elle découvre et auquel elle a du mal à s’adapter, mais intéressante dans sa façon de s’accrocher à des choses simples. La psychologie des personnages est impressionnante, la perception du couple, de la sexualité, des conventions sociales et des non-dits… Ce Manderley qui symbolise un monde, cristallise les envies de ceux qui en sont exclus et finit par occulter ceux qui y vivent, comme s’ils n’étaient plus tout à fait perçus comme des personnes à part entière mais comme les habitants de Manderley, contraints de se conformer à un certain style de vie et à l’image que l’on se fait d’eux.

Époustouflée par le traitement de la nature, omniprésente depuis le récit du rêve des premières pages où elle se présente comme menaçante, hostile, jusqu’aux dernières pages puissantes, en passant par le rouge flamboyant des rhododendrons et la beauté superbement décrite des ciels d’orage au-dessus de la mer…

Ravie de cette relecture qui m’a offert une approche totalement nouvelle et certainement plus riche que mon expérience adolescente. Et qui me donne envie de goûter à d’autres textes de l’auteure ainsi qu’à sa biographie récente, Manderley for ever.

Allez, ouvrez et laissez-vous happer par cette première phrase si célèbre : « J’ai rêvé la nuit dernière que je retournai à Manderley. »

Retrouvez Nicole G. sur son blog

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