Avec les hommes
Mikaël Hirsch

Editions Intervalles
aout 2013
128 p.  16 €
ebook avec DRM 10,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Rencontre

Le narrateur, auteur, venu dédicacer son livre à Brest se retrouve dans un bar. Il a la surprise de retrouver son ancien à camarade Normal ‘Sup perdu de vue depuis plus de vingt ans.
Il n’avait jamais été beau, de cette beauté qui fait mal, plonge le spectateur dans l’embarras, le renvoie immédiatement à son humaine condition. Tout au plus avait-il connu cette sorte d’apogée physique très éphémère, située entre de longues années de modifications approximatives et un rapide déclin. »
Paul a besoin de se confier et il choisit le narrateur pour se lancer dans une longue logorrhée de ses malheurs. Un long récit, pas larmoyant, sincère de ce qu’il a vécu, subi jusqu’à ce qu’une bonne fée lui permette de trouver en lui le positif. Au début, l’écoute de l’écrivain se fait bienveillante, puis plus distraite, avec un petit sentiment de supériorité
Je comprenais parfaitement à présent la raison de ce grand déballage, ou du moins, le pensais-je. J’étais devenu celui qu’il n’était pas. J’avais la vie qu’il aurait dû avoir, si l’amour déçu ne l’avait mis en terre au plus mauvais moment. Non pas qu’il m’ait considéré comme un usurpateur, mais son regard cherchait dans le mien des traces de sa vie enfuie, un bout de lui-même, quelque chose qui aurait porté ses fruits au lieu d’avorter.
A un certain moment, le narrateur se trouve pris, fasciné, happé par le récit de Paul et se met en mode romancier.
« Lui qui n’était pas écrivain avait finalement le talent qui me manque aujourd’hui »
Petit à petit, le récit évolue et si Paul n’était pas le plus mal loti des deux. Vaut-il mieux connaître les affres d’un amour déçu ou, comme le narrateur, s’en protéger et tout donner à la littérature. Paul a eu le courage de se montrer nu, d’ouvrir ses entrailles, de parler honnêtement ; le narrateur s’en est toujours protégé pour taquiner la muse A trop s’économiser, se protéger, on ne vit pas.
« Lui qui me jalousait, je crois, pour ce statut d’écrivain si convoité, parait-il, et pourtant si pathétique, avait connu cet amour véritable dont nous rebat la littérature, auquel je n’ai jamais eu accès, et c’est moi, par conséquent, qui le jalousais à mon tour, dans une forme d’inversion des rôles. »
Mikaël Hirsch écrit « L’amour et la littérature sont tous deux des charognards. » La littérature se nourrit-elle de la vie des autres, des récits des autres ?
C’est ainsi que son histoire, s’en doutait-il seulement, est aussi devenue mon histoire. Si bien que la réalité devient fiction dès lors qu’on la rapporte. J’écrirai par conséquent et faute de mieux, le fruit de nos mensonges réciproques.
Dès les premières pages du livre, j’ai pensé, encore un nombriliste. Heureusement, j’ai poursuivi car j’aime l’écriture élégante, travaillée, fluide de l’auteur. C’est plus que cela, j’y retrouve les thèmes du départ, de la fuite pour revivre, de la quête identitaire rencontrés dans Notre-Dame et Libertalia

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