Cortex
Ann Scott

Stock
la bleue
mai 2017
310 p.  19,50 €
ebook avec DRM 13,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Bombe sur Hollywood

Ann Scott est de ces auteurs dont on se rend compte qu’ils nous ont manqué quand arrive un nouveau texte ! Comme cette pépite, sept ans après « A la folle jeunesse » (chez Stock, 2010). Pour la génération X, elle est l’écrivain du cultissime « Superstars » qui sut si bien rendre compte d’une époque biberonnée à la techno, au punk, au rock alternatif et à cet état d’esprit si particulier des années 80 que sa camarade Virginie Despentes décrit également dans sa trilogie « Vernon Subutex ».

Des Oscars explosifs

« Cortex » est plus ancré dans l’époque actuelle. L’histoire se déroule à Los Angeles. Trois personnages s’y croisent : Angie une réalisatrice française qui vient de renouer avec Jeff, son premier grand amour; Russ, un producteur septuagénaire veuf depuis peu; et Burt, scénariste et humoriste new-yorkais. Tous trois sont présents à la cérémonie des Oscars lorsqu’une bombe explose et fait d’innombrables victimes.

Sans s’appesantir sur le pourquoi de cet attentat ou sur l’identité de ses responsables, Ann Scott s’attache à suivre Angie, Burt et Russ qui sont sortis indemnes, physiquement, de ce drame. L’état de sidération, la colère, le déni, la culpabilité même pour l’un de ces personnages (celle du survivant, ou autre chose ?…) sont observés et racontés. Les routes de ces trois protagonistes vont se croiser dans les jours qui suivent l’attentat.

Les mythes foudroyés

Angie cherche Jeff, dont elle est sans nouvelle, aidée par Russ qui a participé aux premiers secours puisque qu’il était présent comme co-producteur pour cette cérémonie glorifiant le cinéma.

Angie, Russ…mais aussi Burt, qui se filmait en dehors du théâtre où se déroulaient les Oscars au moment de l’explosion, se retrouvent dans un entre-deux bizarre, l’épuisement et l’abattement alternent, une forme de violence larvée et d’impuissance aussi…

Les médias et les réseaux sociaux n’apparaissent que par intermittence, sans que soit montré jusqu’à l’écœurement les images de l’attentat. Alors que Jeff est retrouvé dans un hôpital, bien amoché, la violence de cette tuerie va revenir les frapper. Et foudroyer le lecteur tandis que les noms des premières victimes commencent à tomber. Meryl Streep en fait partie. Surgissent alors comme autant de vagues sur une mer agitée des scènes mythiques, des souvenirs de films…

Ann Scott ne questionne pas seulement notre rapport au cinéma, aux films qui ont nourri nos imaginaires, à ces stars légendaires qui nous servent de modèles… Elle nous prend aux tripes lorsque l’on se retrouve confronté à ce vide : que nous resterait-il si les Dieux de cet olympe cinématographique étaient décimés ? Où trouver de quoi nourrir notre soif inextinguible de beau, d’art, de culture ?

 

partagez cette critique
partage par email
 Les internautes l'ont lu

Drame à Hollywood

La première chose qui m’a attirée vers ce livre est la couverture avec Hollywood, le mot magique pour tous les amoureux du cinéma et les palmiers sur un ciel uniformément bleu. Mais, comme chacun sait : l’habit ne faisant pas le moine, j’étais curieuse de découvrir l’histoire.

Ann Scott nous emmène à Los Angeles, dans le temple du cinéma où la profession va récompenser les meilleurs avec la traditionnelle cérémonie des Oscars.
Soudain, une explosion retentit. L’impensable vient de se produire, malgré un service de sécurité quasiment infaillible.
Il y a des morts, des blessés, des noms circulent. Les secours peinent à arriver.

A partir de là, l’auteure met en lumière trois rescapés de la catastrophe, Angie réalisatrice française qui vient de retrouver l’amour avec un ami de jeunesse, Russ, réalisateur, veuf inconsolable et Burt, un comique quasi inconnu du grand public.
Ces trois destins vont se croiser et se découvrir avec leurs failles, leurs chagrins, leurs espoirs.

Je ressors totalement bluffée par cette lecture. Le sujet était risqué. Les attentats ont été traités dans une foultitude de romans brillants.
De plus, faire mourir sous les décombres des personnalités de premier plan, telles Meryl Streep, Di Caprio ou Robert Redford, il fallait oser.
Et Ann Scott l’a fait intelligemment, sans tomber dans l’excès avec une écriture précise et élégante.
Ce livre est bien sûr un hommage au monde du cinéma et nous interroge sur notre rapport à l’image et à la célébrité.
Pouvons-nous vivre sans ces visages connus et admirés, catalyseurs de tous nos rêves est la principale question posé dans ce roman.

J’y ai vu également une réflexion sur le deuil, à travers le chagrin de Russ qui n’en finit pas de pleurer une épouse aimée.
Le chagrin est-il moins lourd lorsqu’il devient planétaire pour pleurer les stars de Hollywood ?

Cortex est un livre envoutant, dérangeant, brillant, parfaitement maîtrisé. Une belle découverte pour laquelle je remercie NetGalley et les Editions Stock.

partagez cette critique
partage par email