La nuit des enfants qui dansent
Franck Pavloff

Albin Michel
août 2017
279 p.  19,50 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

Rencontre et espoir sur le fil

Matins bruns m’avait interpellée. Comment, en si peu de pages, un auteur arrive, avec un conte philosophique à faire comprendre le racisme, le génocide. Comment on glisse petit à petit vers le pire.
J’ai eu envie de retrouver son écriture avec La nuit des enfants qui dansent.
Zâl, un performeur, prépare et vérifie le fil, la sangle qui lui permettront de s’élancer dans le vide, marcher sur le slack, alors qu’un homme arrivé en taxi, s’installe pour le regarder.
Ils ne se connaissent pas.
Zâl, un garçon tout fin, blond, entouré d’oiseaux qui regarde droit devant lui, comme lorsqu’il avance sur son fil, ras écartés Il refuse de se pencher sur son passé, trop douloureux, trop de manque.
Andras, le specateur, est hongrois d’origine, vit en Autriche traîne son passé comme une valise encombrante et ne regarde plus vers l’avenir. Facteurs d’orgues de père en fils, ils furent empêchés d’exercer leurs métiers par les différents gouvernements, nazis ou communistes.
« Imre Kerté a dit que la différence entre le fascisme et le communisme, c’était que chez les communistes tout le monde portait une étoile, tous suspects »
Au fur et à mesure de l’avancement du livre, je saisis ce qui lie ces deux personnages que tout semble séparer.Jacob, médecin et ami d’Andras le dit page 70 : « Dis-moi, ce garçon c’est bien le fils de Tina dont tu t’es occupé à distance ? »
Un voyage commun dans le van de Zâl, avec Téa et Andras sera le bout du chemin, là où ils se parleront, se comprendront et plus. Ils vont s’apprivoiser eux, que tout semble séparer. Le mur se déconstruit pierre par pierre pour mieux reconstruire leur futur et aller plus avant dans la vie. Cette phrase est un très beau résumé de leur apprivoisement mutuel.
« Rien ne les oblige à cohabiter dans cet appartement de Salzbourg et pourtant aucun ne voudrait rompre l’étrange équilibre en dents de scie qui les rapproche et les lie. »
Il est beaucoup question d’exil. Andras est parti de son pays le Hongrie pour des raisons politiques. Zâl a fui ce même pays encore dans le ventre de sa mère. Téa a fui la violence de son beau-père. En Hongrie, des migrants venus de pays en guerre, espèrent pouvoir passer en Allemagne et se trouvent pris au piège des dérives identitaires du gouvernement hongrois.
Quête identitaire, quête spirituelle, quête de sécurité et sécuritaire, quête initiatique, ce livre nous met en garde contre la peur et le rejet de l’autre. La dérive sécuritaire du gouvernement hongrois pourrait, comme dans « Matins bruns » déboucher sur un grand danger. Il est également source d’espoir car des personnes comme Sara, bénévole auprès des migrants pour leur apporter un peu de chaleur humaine et de ravitaillement. Des liens se créent malgré tout
La musique est omniprésente de Bach à Robbie William sans oublier le Sziget, grand festival pop en plein air ; moment de liesse qui a libéré les deux hommes.

Ce livre est servi par la très belle écriture classique de Frank. Un très beau roman où Zâl, le funambule et Andras qui marchait sur le fil du rasoir vont se rencontrer, conjuguer leurs passés, se dépasser, s’aimer, prouver que l’espoir et le futur existent
Retrouvez Zazy sur son blog 

partagez cette critique
partage par email