Le vol de lucrece
Luce Marmion

Pavillon Noir Editions
novembre 2016
350 p.  14 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

Bien mal acquis ne profite jamais

Adrien Magadur, ex-flic du 36 quai des Orfèvres, travaille depuis son départ de l’administration policière dans une agence privée d’enquêtes et de détective. Il est chargé par son employeur de remettre la main un tableau. Mandaté par l’assureur du tableau, Adrien Magadur se frotte au propriétaire du tableau qui freine des deux pieds quant il s’agit d’aller porter plainte à la police… même si c’est pour évoquer la disparition de sa fille.

Alors au début, force est de constater que Luce Marmion mélange un peu tout. Certes c’est pour perdre un peu le lecteur mais on s’inquiète tout de même de savoir si elle ne va pas se perdre elle-même et ses personnages et son histoire avec. Il n’en est finalement rien. Le brouillard volontairement mis en place par Luce Marmion lève petit à petit ses mystères pour donner corps à son récit, lui donne rune assise plus claire, plus cohérente en reliant au fur et à mesure les différents éléments de l’enquête entre eux.

Du trafic d’œuvres d’art au blanchiment d’argent, il n’y a qu’un pas que franchit allègrement Luce Marmion dans une intrigue à tiroirs ou plutôt devrai-je dire dans deux intrigues dont les fils conducteurs sont Adrien Magadur, son ancien pote des Stups, sa collègue et bien entendu le tableau.

Si les personnages bénéficient d’une vraie profondeur, d’un vrai background intelligemment mis en place par l’auteur, j’aurai un petit bémol sur Adrien Magadur et son soi-disant sex-appeal, son côté matador irrésistible et sûr de lui qui sombre parfois dans la suffisance dont il n’a pourtant pas besoin et les scènes de sexe qui n’apportent rien à l’intrigue.

En dehors de ce bémol, on se prend vite d’amitié pour les personnages principaux de Luce Marmion. Adrien est touchant à travers son passé qui lui a valu de devoir quitter le 36 quai des Orfèvres, son meilleur copain qui ne lui a jamais tourné le dos malgré son côté jeune loup solitaire qui ne l’empêche pas d’éprouver plus qu’une attirance envers la collègue d’Adrien, personnage sur lequel Luce Marmion aurait peut-être pu plus insister et lui donner un rôle plus important. Ce sera peut-être pour une autre aventure d’Adrien.

Car si ce roman peut constituer un one-shot, il peut tout aussi bien faire l’objet d’une suite sous forme d’une nouvelle enquête qui n’aurait rien à voir avec la première mais qui permettrait à Luce Marmion d’approfondir certaines relations ou certains caractères qui n’ont pas levé tous leurs mystères. Je pense bien entendu à la collègue d’Adrien mais aussi à l’informaticien de l’agence de détective, etc.

Le fait pour Luce Marmion de mettre en parallèle le monde des collectionneurs et celui du blanchiment de l’argent de la drogue, en dehors de la crédibilité de la chose, est assez symptomatique. En effet, du drogué au collectionneur, il y a une folie commune, une addiction proche l’une de l’autre même si elle porte sur des choses très différentes. Le collectionneur a ceci de pervers qu’il ne vit sa collection que pour lui, qu’elle n’a de cohérence et de matérialité que pour lui et à travers lui. L’extinction du collectionneur sonne le glas de la collection, elle la vide de toute substance.

Luce Marmion a de la matière pour ne pas s’arrêter là et si elle parvient à éliminer quelques scories narratives inutiles, elle a de beaux jours devant elle. Parmi les légères imperfections qu’on peut relever, la tendance de Luce Marmion à parfois tomber dans la caricature au niveau de ses personnages peut chagriner le lecteur compulsif qui veut aller au-delà de cette facilité. Ce « Vol de Lucrèce » n’en est pas moins un très agréable voyage au milieu des trafiquants de tous poils. Vivement la suite, si suite il y a.

partagez cette critique
partage par email