Les guerres intérieures
Valérie Tong Cuong

Lattès
litterature fra
août 2019
240 p.  19 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu
coup de coeur

« Les guerres intérieures » de Valérie Tong Cuong
est le coup de coeur de la Maison de la presse de Caussade
dans le q u o i  l i r e ? #83

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coup de coeur

Gros coup de coeur

Attention coup de coeur de la rentrée 💖

Pax Monnier est un acteur de seconde zone mais tout peut changer car il vient de recevoir le coup de fil qu’il n’attendait plus. Un grand réalisateur, Peter Sveberg veut le voir pour lui proposer un rôle dans une heure top chrono !

Juste le temps de rentrer chez lui se changer pour arriver à l’heure au rendez-vous qui pourrait changer sa vie.

Rentré chez lui, il entend un cri, des bruits de lutte dans l’appartement du dessus , il hésite à aller voir ce qui se passe, concentré, conditionné par son important rendez-vous. Il s’en va à 16h36 croisant un homme dans l’escalier.

De retour de son audition, il apprend qu’un jeune homme, Alexis Winckler, son voisin, a été violemment tabassé, grièvement blessé, dans le coma.

Une culpabilité le ronge, témoigner ou pas ? Il sera interrogé pourtant et dira qu’il n’a rien entendu de particulier, qu’il n’était pas présent à cette heure-là. Qu’est-ce que cela aurait changé, il n’a rien vu.

Il décide de déménager.

Emi Shimizu est ce qu’on appelle une « half » , elle a les traits asiatiques et est de culture française. elle se sent étrangère où qu’elle vive. Elle travaille aux ressources humaines d’une société de déménagement. Elle est sous pression depuis les deux décès par accident survenus dans son entreprise. Emi souhaiterait organiser une formation aux risques psychosociaux.

C’est dans ce cadre qu’elle rencontre Pax Monnier. L’alchimie se fera et une relation commencera, très vite elle lui parlera de son fils Alexis – il apprendra que celui-ci a perdu la vue de son oeil droit suite à une agression à domicile, mettant fin à son rêve de devenir pilote. Si on était intervenu plus vite, sa vie aurait été tout autre…

Douche froide pour Monnier qui déjà était hanté par cette histoire, sa culpabilité est décuplée, il va devoir vivre avec.

Alexis est terrorisé, il ne veut plus voir personne, ne se souvenant pas de son agresseur. Il le voit partout. Ses rêves se sont écroulés. Pax va essayer de l’aider mais est enfermé dans ce sentiment de culpabilité..

Au départ de cette situation, Valérie Tong Cuong nous décrit à merveille la psychologie de chacun des personnages. Elle nous parle des lâchetés ordinaires. De ces petites choses qui nous concernent tous, qui de nous n’en a jamais été acteur ? Nous sommes tous concernés mais le sentiment de culpabilité ne nous ronge que lorsque nous nous rendons compte des conséquences que peuvent avoir ou non nos actes ou notre inertie.

La plume est fluide, captive, sensible, elle nous conduit au plus profond de nous mêmes face à la prise de conscience de nos actes. Elle nous fait ressentir les culpabilités et émotions de chacun. Le récit est remarquable, on est suspendu et surpris jusqu’au terme.

C’est humain, magnifique, un véritable coup de coeur de cette rentrée.

Ma note : ♥♥♥♥♥

Merci à NetGalley et JC Lattès pour cette belle découverte.

Les jolies phrases

Vivre est un risque.

Ce qui me fascine c’est la précarité de l’intermittence qui vont de pair.

Il est apparu dans des productions complaisantes et s’est gâché, oubliant que c’est le rôle qui révèle le talent et non le talent qui fait la force du rôle. Il a négligé l’importance du désir, qui requiert une combinaison fragile de rareté, de qualité et d’exigence.

Il est la source de son énergie tout comme elle est la sienne.

Certaines traces ne disparaissent jamais tout à fait.

Le collier est serré et la laisse courte, mais le chien est méchant, et pas si bête, il mordra les maîtres avant de crever.

Elle sait construire les forteresses, les barrages, les digues, mais ignore comment libérer les trop-pleins.

Elle possédait une énergie singulière et surprenante pour un être aux racines flottantes, se laissait entamer mais jamais abattre, progressant avec l’horizon en point de mire, ralentissant parfois face aux vent ou aux murs, ajustant son trajet et ses objectifs aux aléas de l’existence. C’est ce fonctionnement unique qui l’a sauvée de l’abîme, hier comme aujourd’hui.

Une héroïne est courageuse, or elle s’estime guidée selon le cas par la peur, la nécessité, le devoir ou l’amour, mais par le courage, ça non.

Tout bien pesé, il n’était pas pire qu’un autre. Tout était question d’occasion, cette occasion équilibrerait le monstre sommeillant en chacun de nous. La lâcheté était peut-être le caractère le mieux partagé dans ce monde : chacun l’expérimentait tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre, et s’empressait aussitôt de la dissimuler.

Il est une route traversée d’un ravin sans fond ni pont pour relier les deux rives : celle de la vie d’autrefois et celle de la vie à venir.

De surcroît, cela pourrait consolider un édifice bâti sur un trompe-l’oeil. Ainsi en va-t-il des rumeurs, plus on additionne les voix qui les chuchotent, plus le faux devient le vrai.

Or la solitude, ce sont des pensées importantes, pleines de sens, c’est la contemplation, le calme, la sagesse.

L’impossibilité de connaître la vérité. C’est ce qui les tue : savoir que cette vérité existe, mais qu’ils n’y ont pas accès.

Il y a seulement deux poids dans la balance, d’un côté la vérité brute, l’honneur et la chute, de l’autre le confort, la honte et la trahison.

Retrouvez Nathalie sur son blog 

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