NOS VIES
Marie-Hélène Lafon

Buchet-Chastel
litt francaise
aout 2017
192 p.  15 €
ebook avec DRM 5,99 €
 
 
 
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coup de coeur

Une madeline gourmande et goûtue

Elle s’appelle Gordana, est caissière (caisse n°4) au Franprix du n°93 de la rue du Rendez-vous dans le 12ème arrondissement de Paris. La narratrice la décrit avec force de mots, de
superlatifs, lui invente une vie. Un homme, Horacio Fortunato (je saurai son nom plus tard), chaque vendredi à la même heure, passe toujours par la caisse de Gordana. Jeanne lui invente aussi une vie et, comme les enfants, emploie le futur du conditionnel, il serait, il aurait… Son assiduité l’autorise à ébaucherune histoire d’amour entre eux, histoire d’amour qui n’aura pas lieu.
Cette femme qui raconte à la première personne, s’appelle Jeanne Santoire. Elle remonte aussi sa vie, parle de sa grand-mère aveugle, de la vieillesse de ses parents, des liens qui les relient. Il y eut Karim, l’homme de sa vie, un Algérien, que le père qui avait fait la guerre d’Algérie n’a jamais voulu rencontrer. Une vie de couple entrecoupée de silence. Il ne sait rien de sa vie antérieure pas plus qu’elle ne connait la sienne. Un jour, il part pour l’Algérie et ne reviendra jamais à Paris, sans plus d’explication. Plus tard, elle apprend qu’il vit à Marseille, marié, avec un enfant.
Cette fois, le roman se passe à Paris, même si il y a des incursions mémorielles en province. Marie-Hélène Lafon a quitté sa Creuse natale pour remonter vers le nord, en suivant, peu ou prou, la Nationale 7. Souvigny, Saint-Hilaire, Moulins, Nevers… Comme elle remonte le fil de ses souvenirs.
Toutes ces histoires inventées sont faites à partir de solitude, pour en combler le vide qu’elle ressent. Ses souvenirs jouent à saute-moutons avec les vies qu’elle invente.
Les phrases sont longues, ponctuées, comme elle les aime, de virgules et points virgules (plus guère utilisé). L’écriture est riche, inventive. Avec Marie-Hélène Lafon, je prends un bain de mots que les voyelles font mousser, les ponctuations me soutiennent dans ma lévitation au
pays de ses rêves.
J’ai gardé ce livre pour la fin, pour le déguster comme un dessert et je me lèche les doigts de ses expressions qui fleurent bon l’Auvergne. « Il s’était enroutiné à Saint-Hilaire ». « Il faisait besoin à sa mère». « En me regardant aux yeux », « Faire maison ». Une madeleine gourmande et goûtue.
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coup de coeur

Des vies…

Ni bruit ni fureur dans les courts romans de Marie-Hélène Lafon.
Pas de mots inutiles non plus, juste un regard acéré , une mémoire infaillible et un don pour restituer simplement les gens et les choses.
Des phrases épurées pour inventer la vie de Gordana, une caissière de Franprix dans un quartier de Paris, une observation longue et silencieuse pour sentir ses failles, sa vie .De la même manière elle invente la vie d’un client assidu de Gordana.
Un bref instant, on aperçoit le pied-bot de cette jeune femme d’origine étrangère certainement, et là, on peut lui inventer une autre vie.
Dans le même temps , l’observatrice raconte aussi son propre parcours, ses désillusions .
En fait ces personnages déracinés se retrouvent à Paris, non pas perdus dans la grande ville mais arrimés à leurs habitudes .
J’admire cette capacité de l’auteur de tout dire avec peu de mots , mais si justes.
La lecture est courte mais dense. Un calme bonheur .

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