Par delà nos corps
Bérengère Cournut

Le Tripode
février 2019
 13 €
 
 
 
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coup de coeur

Réponse à Cendors

Plus que séduite par le livre de Pierre Cendors « Minuit en mon silence », j’ai apprécié que Bérengère Cournut s’empare de ce texte et propose un long monologue en réponse à la lettre d’amour envoyée par le lieutenant allemand Werner. Choix de la date, peut-être pas innocent ; Else répond le 25 août 1939, aube de la seconde guerre mondiale.
Else et Werner n’ont jamais été amants, ne se sont jamais déclarés leur flamme et, pourtant, à la lecture des missives, il en ressort un amour magnifié par l’éloignement, le temps, la non-consommation.
Cet amour absolu et éthéré a permis à Else de se relever du deuil de son premier mari, d’aller de l’avant, d’oser. Il n’y a rien de triste ni de funèbre dans ce petit livre. Une énergie de vivre éclate au fil des pages.
Else n’a pas refait sa vie, elle l’a continuée, rencontré l’amour, un amour total moral et physique.
Cet épître, récit d’une femme libre, est un ode à la vie, à l’amour, à la maternité, à l’espoir magnifié par une écriture poétique, sensible.
J’ai aimé et trouvé original que deux auteurs, tous deux édités par Le Tripode, s’écrivent, se répondent par personnages interposés, par-delà l’esprit.
Est-ce un coup de cœur, je ne sais le dire, mais c’est une coulée de miel et de douceur. J’aime l’univers, l’écriture emplie de poésie de Bérengère Cournut. découverts avec « Schasslamitt » et « Née contente à Oraibi » et cela confirme tout le bien que je pense des éditions du Tripode.
Oui, c‘est un coup de coeur, de tendresse

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coup de coeur

Femme de lettre

En 2017, Pierre Cendors publiait un petit bijou de livre, « Minuit en mon silence », dans lequel un jeune lieutenant allemand écrivait une longue lettre à une femme aimée avant d’être fauché par la Grande Guerre. Bérengère Cournut, elle aussi auteure de l’excellente maison d’éditions Le Tripode, eut l’idée de répondre au personnage de Pierre Cendors en inventant dans ce roman épistolaire la voix de la destinataire. Jolie démarche originale de deux auteurs contemporains qui correspondent à travers leurs personnages.

Elisabeth reçoit la lettre posthume de Werner en même temps qu’elle apprend la mort de son mari sur le front opposé. La jeune veuve est dévastée, et en réaction à l’injustice de cette guerre, elle se jette dans l’action. Un temps volontaire pour soigner les blessés à l’arrière, elle fuit à travers l’Europe en suivant des hommes de passage ; la mer Noire l’arrête, mais le fracas de la guerre ne s’est pas encore tu. On découvre une force qui va, sous le signe de l’eau vive, des courants et des marées, une fille de l’océan voulant « vivre à tout prix ». Son amant secret était un peintre mélancolique, un contemplatif solitaire qui écrivait la nuit, parlait de l’art et de la mort. Dans sa lettre, Elisabeth contredit l’image éthérée de celle qui posait sagement dans l’atelier du jeune peintre allemand et se décrit comme une femme de désir, de chair et de sang, à l’écoute de son corps, les sens à l’affût, vivant la maternité comme une aventure et allant libre au-devant du monde. En secret, Werner l’accompagne, « goutte d’eau » dans sa vie, mais de celles qui étanchent la soif dans les moments les plus arides de l’existence. Figure lumineuse et incarnée, la narratrice recherchera la rencontre avec l’autre, inspirée par l’écho de son éternel soupirant : « vous étiez mon souffle et toute ma poésie ».

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