Regarder
Serge Mestre

Sabine Wespieser
février 2019
232 p.  19 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu
coup de coeur

Regarder de Serge Mestre
est le coup de cœur de la L’Arbre à papillons à Phalsbourg
dans le q u o i  l i r e ? #68

 

 

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De la chambre noire à la lumière

Ces temps-ci, les livres consacrés à la photoreportrice Gerda Taro fleurissent : redécouverte de celle qui fut la compagne de Robert Capa, mais plus encore fascination pour une femme libre et passionnée, qui mourra dans l’exercice de son métier en juillet 1937. Serge Mestre met en lumière cette figure engagée dont le travail a été pleinement révélé il y a peu.

Née Gerta Pohorylle en 1910, la jeune femme juive allemande décide de s’exiler dès 1933, après sa détention par la police du Parti national-socialiste ; le climat d’antisémitisme, de haine et de suspicion est intenable. Elle aurait pu rejoindre son fiancé ou bien son amant en Italie, mais elle choisit la France où elle vit de petits travaux de secrétariat, côtoyant d’autres exilés dans les cafés de Montparnasse. C’est ainsi qu’elle rencontre à La Coupole le photographe hongrois inconnu André Friedmann, pour qui elle inventera le pseudonyme de Robert Capa en même temps que le sien : Gerda Taro. C’est lui qui l’initie à la photographie en même temps qu’ils deviennent amants, mais en amour Gerda n’est pas exclusive… Professionnellement, elle prend son envol lorsque Aragon l’engage pour son journal ; le temps où elle laissait complaisamment Capa signer ses photos est terminé.

Une photographe engagée

Indépendante et intrépide, notre héroïne voyage, choisit son nom, son métier, ses amants. Trop libre pour être inféodée à un parti, elle revendique toutefois son adhésion à la république contre le fascisme. Et lors de ses séjours en Espagne en pleine guerre civile, elle assume le fait que son travail serve la cause des Républicains. Serge Mestre insiste sur cet aspect essentiel : la photographie de Gerda Taro est engagée. Ce formidable roman décrit une femme de terrain qui avait compris le basculement du monde, tout comme Willy Brandt, Rafael Alberti, Saint-Exupéry, Hemingway ou René Spitz que l’on croise ici. Restée trop longtemps dans l’ombre de son mentor, Gerda Taro, figure solaire, est rendue à la postérité avec éclat.

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