Zebraska
Isabelle Bary

Editions Luce Wilquin
Smeraldine
septembre 2014
224 p.
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

Drôle de zèbre

Un roman pour mieux comprendre le Haut Potentiel.

Martin Leroy a quinze ans, il est né le 24/05/2035. Il vient de recevoir un étrange cadeau de Noël de Mamiléa sa grand-mère : un paquet de feuilles reliées, un roman. C’est une blague, pense-t-il, nous sommes en 2050 et personne ne lit plus de livres aujourd’hui. On utilise une tablette holographique.

Il tourne la première page et y trouve une dédicace « A mon petit zébron Marty », non c’est bien pour lui c’est le surnom que lui donne sa grand-mère.

Ce livre le titille, au risque de paraître ringard, il l’entame en cachette et se plongera ainsi dans le passé. Cette histoire, c’est celle de Mamiléa il y a quarante ans, le (l’anti-) héros n’est autre que son père Thomas.

Nous allons découvrir sa vie en 2010, lui enfant HP comme on le nomme, enfant à Haut potentiel, surdoué, précoce .. mais qui est-il vraiment ?

Un roman original qui nous fait découvrir qui sont vraiment les enfants HP, parent et enfant sont les (anti) héros de ce livre.

Un univers particulier, méconnu pour certains. Ce livre m’a beaucoup touché car le sujet je le connais bien, je le vis au quotidien, mon fils étant un petit zèbre.

Savez-vous que ces enfants sont extraordinaires, complexes car ils pensent autrement que la plupart de nous. Leur questionnement est sans limite. Ils ont une hypersensibilité extrême, un sens profond de la justice ou de l’injustice, un curiosité sans borne. Ils ont aussi un sens de l’humour particulier, une difficulté à entendre des consignes qui les rend colérique.

Ils pensent sens cesse, leur cerveau bouillonne continuellement. Ils trouvent difficilement leur place et se cherchent continuellement, conscients de leur différence.

Et les parents essayent par tous les moyens de les aider à trouver leur place, à trouver le bonheur. Pas toujours simple mais tellement riche.

Ceci n’est pas un livre sur les enfants HP mais un roman où ils sont mêlés. Merci Isabelle Bary, merci aux Editions Luce Wilquin pour cette belle découverte.

La façon d’aborder le sujet est vraiment géniale, Marty lit le livre de sa grand-mère et l’analyse à sa façon, c’est vraiment très réaliste, avec comme ces enfants beaucoup d’humour. Un beau témoignage rempli d’amour et de tendresse.

L’essentiel est dit, on fait sauter les clichés et ce livre permettra certainement de comprendre ceux qui ne les connaissent pas.

L’écriture alterne entre le roman (vécu, doute, espoirs de Mamiléa) et les réflexions de notre zèbre.

J’ai vraiment beaucoup aimé.

Je vous invite à lire « Les jolies phrases » qui vous permettront de bien comprendre les zèbres.

Ma note : 9/10

Les jolies phrases

Il va falloir vous habituer, mon cerveau fourmille d’idées. C’est une sorte de phénomène inné. Elles viennent toutes en même temps et ma tête ne s’arrête jamais de tourner. Je passe de l’une à l’autre en jonglant. C’est épuisant ! Si un sujet m’intéresse particulièrement, j’arrive à m’y plonger profondément. Cela me détend jusqu’à ce que quelque chose me contrarie, alors la colère monte en moi comme un ouragan et j’en veux au monde entier !

Marty : les uns et les autres ne s’adaptent pas à la vie suivant une unique procédure. Ils font preuve d’imagination.

L’idéal, un mot affreux qu’on aurait mieux fait de ne pas inventer. Un mot qui suppose que la vie est une perfection qui se travaille. Il n’y a que les fous et les morts qui sont parfaits.

Vivre est un art.

Un fils qui apprend des choses à sa mère, c’est le monde à l’envers.

Lire est une conquête, un acte d’insolence qui ne tolère aucune simplification ni évidence.

Thomas voulait être comme les autres, ils les aimait profondément, mais il n’aimait pas leurs jeux ni leurs idées. Il parlait comme un avocat du barreau, balançait son corps d’avant en arrière en criant lorsque quelque chose le contrariait, s’endormait difficilement, s’isolait dans des pensées inaccessibles, s’enfonçait les doigts dans les oreilles lorsque les sermons de mère lui rappelaient qu’il n’était qu’un enfant.

Quand cela se brouille dans ma tête, je n’ai que ce mot là en boucle : désolé.

Comment lui dire que s’il est gauche, c’est parce qu’entre sa tête et son corps, le combat est inégal ? Que son esprit a toujours une longueur d’avance et que les bras, les jambes, les doigts font ce qu’ils peuvent, mais qu’ils ne suivent pas? Que ce qu’il ressent comme une tare est un cadeau ?

Il est né avec une sorte de formule un dans la tête, mais il lui était impossible de l’arrêter, ni de la piloter.

Le pire c’était sa souffrance, le pire c’était mon impuissance, le pire c’était la violence sans cesse décuplée de ses crises, le pire c’était la peur de ne pas s’en sortir.

Il me dit qu’il se déteste, qu’il aimerait être différent, mais que c’est plus fort que lui. Il me dit qu’il ne sait pas comment s’y prendre avec la vie.

…Je suis incapable de suivre les conseils ! – et si je ratais ma vie.

Tout est affaire de mots ! Ou plutôt d’images que ces mots créent en nous. Si on change la définition d’un mot, ou si on transforme l’image que ce mot projette en nous, on modifie aussi notre façon de vivre. On ne voit pas les choses comme elles sont vraiment, mais comme nous les ressentons. Ce ne sont pas simplement nos yeux qui voient, mais toute notre personne, avec ce qu’elle sent, goûte et ressent, son passé, son histoire. Les mots sont beaux par cette seule perspective. Quand je lis les mots écrits par un autre, ils ont son parfum, mais ma couleur. Et c’est ce mélange qui est détonnant! Ca procure comme un vertige. J’ai fait l’exercice pour le mot bonheur.

Le cerveau de votre fils est un bijou, on le définit à Haut Potentiel, mais il n’en a pas le mode d’emploi et cela le déroute en permanence.

Etre une bonne mère, c’est empêcher son enfant de vouloir être un autre.

Je pense trop, je pense fort, je ne dors plus. Maintenant que plus rien ne reste en surface, j’ai du mal à gérer les embouteillages d’émotions qui klaxonnent à l’intérieur.

Je ne veux pas qu’il devine mon inquiétude, je ne veux pas l’empêcher de grandir, je veux juste qu’il n’ait pas mal. Je crois que c’est là le destin de toutes les mères. Et quand elles ont des enfants différents, c’est juste un peu plus palpitant.

On ne choisit pas le monde qui nous entoure, mais bien la façon de s’y promener.

Le collège, c’est un peu une école de vie, un brouillon pour apprendre à se faire une place dans la société. Cela t’apprend à vivre avec les autres. Même si ça te paraît difficile, c’est une sorte d’entraînement pour plus tard.

Pourtant, je ne suis qu’un paquet de doutes et de questions. Avec le travail, l’amour et le temps, cela a tout simplement cessé de me contrarier.

Tout le temps on me pousse à faire des choses dont on me croit incapable. Et je suis stressé de les rater. Sinon on se moque et on me laisse seul.

Il faut être prêt à entendre une histoire. Car une histoire, ce n’est pas qu’une histoire ! Il y a toujours un écho caché derrière elle. C’est en cela qu’elle est fabuleuse, elle éveille celui qui la lit.

Sans base, rien ne tient. C’est exactement ça ! Comprendre ne suffit pas Thomas. Si tu ne mémorises pas un minimum tes cours, si tu ne suis pas les consignes imposées, tu négliges les fondations sur lesquelles reposent tes apprentissages futurs, et tout finira par s’écrouler. Même ta belle façon de penser.

Retrouvez Nathalie sur son blog    http://nathavh49.blogspot.be/2014/11/zebraska-isabelle-bary-910.html

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